ZNT : « se donner les clés pour se comprendre », quand agriculteurs et écologistes dialoguent

Dans l’Oise, le dialogue s’instaure dans les champs entre agriculteurs, associations environnementales et élus.

Cinq personnes qui discutent au milieu d’un champ de betterave, en bordure d’une bourgade de l’Oise, un matin de juin. Rien d’exceptionnel si ce n’est qu’il s’agit d’un agriculteur, de représentants d’association de protection de l’environnement et d’élus municipaux qui échangent. Et en soi, c’est un événement. Les uns cherchent des réponses à leurs questions et l’agriculteur, Alexandre Portier, entend tout leur expliquer de son métier. La raison de ce rendez-vous au champ ? Les ZNT. À l’automne, elles amputeront la SAU de l’agriculteur de 2 hectares : le parcellaire d’Alexandre Portier est bordé de lotissements.

« Et là, vous gagnez votre vie ? »

« J’utilise des produits phyto quand je ne peux pas faire autrement. Je les applique quand il n’y a pas de vent, souvent la nuit. Quand on m’interpelle, je m’arrête et on discute », raconte avec naturel l’agriculteur. Pour autant, il ne croit pas à l’intérêt des ZNT, bien au contraire : « la situation va empirer. Les gens qui ont peur vont se sentir justifiés dans leurs peurs ». Pourtant, avec patience, il répond à toutes les questions. Avec pédagogie, il détaille son métier. « Mes betteraves ont la jaunisse et la perte de rendement va être au moins de 30 % », explique-t-il, sans lamento. « Et là, vous gagnez votre vie ? » « Non ». Silence.

La première adjointe de la commune de Le Mesnil-en-Thelle écoute. « Les élus ont un rôle de lien entre la population et les professionnels. Le maire est le pivot d’une concertation », justifie Marie-Thérèse Lecervoisier. Le Mesnil-en-Thelle compte 2 500 habitants pour un agriculteur. Située à 30 kilomètres au nord de Paris, la commune est attractive : à la campagne mais proche des bassins d’emploi.

« Ne vous mettez pas la tête dans le sac »

Les responsables de l’association Roso, qui regroupe les associations de sauvegarde de l’environnement de l’Oise, multiplient les questions. Sans complaisance, mais avec respect. « Nous sommes là pour comprendre l’intérêt des ZNT et se donner les clés pour se comprendre, mais je dis aux agriculteurs : ne vous mettez pas la tête dans le sac. Ne faites pas l’autruche face aux exigences qui vous sont posées », précise Didier Malé, président de l’association Roso, Le militant se définit lui-même comme « un écolo convaincu qui apprend à écouter car ce n’est pas en tirant sur les gens qu’on avance ». À voir comment la discussion s’enrichit, on se dit que le dialogue entre les différentes composantes de la société est encore possible. À condition d’avoir la patience de faire un pas vers l’autre.