Un millier d’agriculteurs font route vers Paris pour exiger l'application de la loi EGalim

Les agriculteurs se mobilisaient mercredi matin, prévoyant de se masser aux portes de Paris à l'orée d'une journée de manifestation dans toute la France. L’objectif est de faire monter la pression sur des négociations commerciales avec la grande distribution, à l'appel des syndicats FNSEA et Jeunes Agriculteurs.

Plus de 1.000 tracteurs venus des régions Hauts-de-France, Normandie, Ile-de-France, Grand-Est, Centre-Val-de-Loire et Bourgogne-Franche-Comté devaient converger vers l'avenue Foch, quartier cossu dans l'ouest de Paris. Certains représentants syndicaux, critiques des accords de libéralisation commerciale de l'UE, qui augmentent les importations agricoles et alimentaires en France, ont demandé à rencontrer le président de la République.

Peu après 07H30, le trafic en région parisienne était élevé pour un jour de semaine, avec 250 km de bouchons cumulés, selon le site d'information aux usagers Sytadin. Mathieu Garnotel, qui exploite 130 hectares dans la Marne, est venu avec une vingtaine d'autres agriculteurs rejoindre les convois parisiens, mercredi matin à Coutevroult en Seine-et-Marne, près du péage sur l'A4. "Actuellement dans la Marne, un exploitant sur trois est à zéro ou en déficit, et l'année précédente nos revenus avaient baissé de 75% par rapport à la moyenne 2010-2014, à cause de la chute des prix, de la suppression des quotas (sucriers, NDLR) et de l'augmentation des charges (matériel et intrants plus chers, augmentation de la redevance pour pollution diffuse et de la taxe sur l'azote), on est pris dans un effet ciseau", explique-t-il.

Mardi soir, une cinquantaine d'agriculteurs de Loire-Atlantique et du Maine-et-Loire ont visé la coopérative Terrena et des grandes surfaces, à Ancenis (Loire-Atlantique), rapporte le quotidien Ouest-France mercredi.

Pression sur la grande distribution

La Loi Egalim, issue des Etats généraux de l'alimentation et mise en place en début d'année, était censée ramener du revenu dans les cours des fermes en rééquilibrant les relations commerciales, mais jusqu'ici les agriculteurs disent ne pas vraiment voir de différence. Les manifestants veulent donc mettre la pression sur la grande distribution et ses fournisseurs, alors que viennent de commencer les négociations commerciales annuelles qui fixent les prix pour un an.

"Nous voulons que les distributeurs jouent le jeu et ne fassent pas comme a fait Lidl il y dix jours, du steak haché à 6,75 euros le kilo, ce qui est un profond scandale. C'est comme quand Carrefour avait fait le lait à 0,87 euro en bio l'année dernière", a expliqué à l'AFP Christiane Lambert, présidente de la FNSEA.

50 intrusions

En Rhône-Alpes, des agriculteurs de toute la région ont prévu de bloquer les accès autoroutiers de Lyon en trois points: au nord (Limonest), au sud (Ternay) et à l'est (Beynost). A chaque point, une cinquantaine de tracteurs devraient être positionnés, selon la FDSEA et les JA.

Le ministre de l'Agriculture Didier Guillaume a indiqué mardi à l'Assemblée nationale qu'il partageait les inquiétudes des agriculteurs qui "sont malmenés, qui sont montrés du doigt". "Depuis une dizaine de mois, c'est 50 intrusions dans des exploitations agricoles, dans des bâtiments d'élevage. Ce week-end encore, trois bâtiments ont brûlé, ce n'est pas acceptable !", a souligné le ministre.

Dans la nuit de vendredi à samedi dernier, trois incendies ont touché des exploitations laitières dans le secteur de Romans-sur-Isère (Drôme), tuant 30 bovins, selon la gendarmerie. Ces incendies n'ont pour l'heure pas été revendiqués.

En Auvergne, des agriculteurs viendront des quatre départements auvergnats (Cantal, Puy-de-Dôme, Haute-Loire et Allier), mais aussi de la Loire et de la Creuse pour une action dans la matinée sur l'A71 près de Clermont-Ferrand.

Des mobilisations sont également prévues à Toulouse et dans le Vaucluse, qui a prévu une "journée de deuil de l'agriculture vauclusienne".

"On devait y être, mais ce n'est pas possible, là il y a des gens en détresse. On a au moins 200 agriculteurs qui ont tout perdu, maison, exploitation et leur salaire pour l'année", a expliqué pour sa part Sylvain Audemard, de la FSDEA du Var, deux jours après des inondations catastrophiques qui ont frappé son département.