Blé : les prix actuels profitent-ils aux agriculteurs ?

Si depuis quelques mois, les prix des céréales atteignent des sommets, les agriculteurs n'en bénéficient pas forcément, estime la Coordination rurale (CR), qui s'inquiète des prix d'acompte versés par les coopératives et organismes stockeurs qui restent très faibles et font l'objet de retenues importantes sur la qualité.

« Selon les chiffres de l’observatoire de formation des prix et des marges, le coût de revient du blé en France sur les dix dernières années est à plus de 200 €/t, a indiqué Damien Brunel, agriculteur dans les Hauts-de-France et vice-président de la CR, lors d’un point presse le 8 septembre sur le salon Innov-Agri. Ce qui signifie que depuis 10 ans, on vend en dessous de notre prix de revient, et que sans les aides, on serait complètement dans le mur ».

« Les prix actuels ne sont donc qu’un juste rééquilibrage, complète Bernard Lannes, président de la CR. Dommage qu’il faille des accidents climatiques pour que les prix reviennent à des niveaux rémunérateurs ».

"80 euros d’acompte"

Pour autant, malgré des prix des céréales qui atteignent aujourd’hui des sommets, la CR émet des doutes sur le fait que les agriculteurs puissent en bénéficier. Le syndicat s’inquiète en effet des prix d'acompte versés par certaines coopératives et organismes stockeurs. « Dans mon secteur, on a des prix d’acompte qui sont en général de 120 euros par les organismes stockeurs, avec des réfactions très importantes et parfois même abusives, témoigne Damien Brunel. Par exemple, une réfaction de 20 euros dès lors que le PS est en dessous de 76, et 20 euros encore si le taux de protéines est en dessous de 11. Certains agriculteurs ne vont donc toucher que 80 euros d’acompte ».

"On va mettre le nez dans le prix de l’aliment"

Dans ce contexte, le syndicat s’interroge sur les hausses annoncées de l’alimentation animale.  « Comment le prix de l’aliment peut-il monter, avec des blés déclassés, dont les prix ne sont pas plus hauts que les années d’avant ? », s’interroge Bernard Lannes.

« On va mettre le nez dans le prix de l’aliment, prévient Bernard Lannes. C’est un peu gros de monter toujours les céréaliers contre les éleveurs ».

Au sujet de la proposition de loi dite « Egalim 2 », censée soutenir le revenu des agriculteurs, le syndicat s’estime « déçu » de la position de l’interprofession céréalière. « Intercéréales demande à ce que les céréales soient exclues de la future loi, regrette Damien Brunel. Même si on sait bien que les céréales sont dans un marché mondial, nous pensons que c’est une opportunité loupée ».