Comment rehausser le taux d’auto-approvisionnement en fruits et légumes frais ?

Une étude commune de FranceAgriMer et d’Interfel formule plusieurs recommandations en vue de gagner 5 points de souveraineté à horizon 2030, pour les cultures sous serre et abri, les cultures de plein champ et l’arboriculture.

19% en poivron sous serre/abri, 39% en aubergine sous serre/abri, 45% en courgette sous serre/abri bri, 58% en tomate serre/abri, 64% en carotte de plein champ, 81% en oignon de plein champ, 30% en raison de table, 42% en poire, 54% en pêche-nectarine, 69% en cerise de table, 75% en abricot, 85% en pomme... : tels sont les taux d’auto-approvisionnement caractérisant la production de fruits et légumes frais, figurant dans une étude réalisée par le cabinet Agrex Consulting pour le compte de FranceAgriMer et d’Interfel. Objectif de l’étude : identifier les freins et levier d’action en vue d’atteindre les objectifs assignés au Plan de souveraineté des filières fruits et légumes, à savoir regagner globalement 5 points d’auto-approvisionnement d’ici à 2030 et enclencher une hausse tendancielle de 10 points d’ici à 2035.

Selon le ministère de l’Agriculture, le taux d'auto-approvisionnement en fruits et légumes frais (hors pomme de terre) est passé de 64,6% à 50,8% entre 2000 et 2020. Résultat : la balance commerciale affichait en 2022 un déficit de 3 milliards d’euros pour les fruits frais et de 710 millions d’euros pour les légumes frais, sans compter les 3,6 milliards d’euros de déficit imputable aux fruits et légumes transformés. L’autonomie alimentaire en matière de légumes surgelés et en conserve pointe respectivement à 26% et 57%.

Taux d’auto-approvisionnement moyens de 9 pays sur pour 18 espèces de fruits et légumes sur la période 2019-2021 (Source : FranceAgriMer – Interfel)
Taux d’auto-approvisionnement moyens de 9 pays sur pour 18 espèces de fruits et légumes sur la période 2019-2021 (Source : FranceAgriMer – Interfel)

Avec un volume de 8 millions de tonnes, la France est le 4ème producteur européen de fruits et légumes, derrière l’Espagne, l’Italie et la Pologne. Fondée sur un état des lieux et une comparaison circonscrite à nos compétiteurs européens, l’étude d’Agrex Consulting porte sur les cultures sous serre et abri, les cultures de plein champ et l’arboriculture, représentatives de 19 espèces de fruits et légumes.

Cultures sous serre et abri : deux paradoxes à négocier

En ce qui concerne les cultures sous serre et abri, l’étude pointe le vieillissement du parc, peu compatible avec la sobriété énergétique et la robotisation, tout en relevant que les niveaux d’investissements requis ne sont pas de nature à favoriser le renouvellement des générations. L’étude relève un autre paradoxe, né du souhait des consommateurs à disposer d’une offre locale tout au long de l’année, mais stigmatisant par ailleurs le recours au chauffage et à l’éclairage. Assorti d’efforts de communication, l’étude prône l’accompagnement technique et financier des porteurs de projet, moyennant le recours à des sources de chaleur alternatives. Il est aussi question d’alternatives s’agissant des méthodes de lutte contre les bio-agresseurs, les serres étant propices à la réduction d’emploi des produits phyto (et à l’optimisation de la ressource en eau).

Cultures de plein champ : des leviers de l’amont à l’aval

Côté amont, l’étude recommande d’orienter la recherche variétale vers des plants adaptés au changement climatique, sans sacrifier les rendements compte tenu de la pression foncière pesant sur l’agriculture. Et pour maximiser le rendement, rien de tel que l’irrigation, à l’efficience rehaussée et au périmètre élargi à des régions aujourd’hui sous-dotées. En ce qui concerne la maîtrise des bioagresseurs, l’étude se focalise sur la réduction des pertes au stockage en chambre froide, qui mériterait un programme de recherche spécifique. En ce qui concerne la commercialisation, l’étude recommande de consacrer davantage de moyens à la lutte contre la francisation des produits et de diminuer le nombre de cahiers des charges privés, au profit de labels aux cahiers des charges « strict ».

Arboriculture : renouveler les vergers et les générations

Le phénomène de francisation n’échappe pas au secteur des fruits, jugé « massif » sur certains segments. Mais la filière fruits a d’autres défis existentiels à relever que sont la rénovation des vergers et l’installation de nouveaux producteurs (la moyenne d’âge est de 55 ans), ainsi que la nécessité de pouvoir disposer de main d’œuvre saisonnière, via la pérennisation du dispositif TO-DE. La diversification est une piste évoquée pour augmenter les surfaces et renforcer l’offre française, assortie d’une communication sur les signes de qualité et autres mentions positives, le tout en adaptant le verger aux effets attendus du changement climatique. Pour installer des jeunes, l’étude recommande d’accompagner techniquement et financièrement les porteurs de projet. Sur le front phytosanitaire, sans surprise, la recherche d’alternatives est prônée.