Fruits et légumes : le gouvernement à l’assaut de la souveraineté

[Edito] Inciter les consommateurs à manger plus de fruits et légumes est déjà un défi en soi… Faire en sorte que ces mêmes consommateurs achètent des fruits et légumes français en est un autre ! Alors que le déficit commercial de la France en fruits et légumes frais s’est largement creusé ces 15 dernières années, le gouvernement entend bien inverser la tendance en lançant un ambitieux plan de souveraineté.

« Manger cinq fruits et légumes par jour » : ce mantra est bien inscrit dans la tête des consommateurs, et pour cause : il a été préconisé par le Programme nutrition santé (PNNS) il y a déjà plus de 20 ans, en 2001. Mais dans la pratique, l’objectif est loin d’être atteint. Actuellement, seul un enfant sur dix et un adulte sur trois respectent cette recommandation nutritionnelle, selon une étude du Credoc datant de 2021. Dans le même temps, la production de fruits et légumes française diminue depuis 20 ans, entraînant une hausse de la dépendance aux importations.

La production française ne couvre ainsi que 60% de la consommation de fruits frais tempérés (hors agrumes et dattes). La dépendance de la France aux importations est moindre pour les légumes, puisque le taux de couverture par la production nationale était de 79% en 2019. Néanmoins ce chiffre est en baisse, car il était de 85% en 2005. De plus, comme pour les fruits, cette augmentation de la dépendance aux importations n’est pas liée à une hausse de la consommation, mais plutôt à une diminution structurelle de la production nationale.

Face au double défi d’augmenter la part de fruits et légumes dans l’alimentation des Français tout en réduisant la dépendance aux importations, le gouvernement a lancé un plan de souveraineté en fruits et légumes, dont le premier comité de pilotage, présidé par le ministre de l’Agriculture Marc Fesneau, a eu lieu le 25 mai dernier. L’objectif, ambitieux, est de réussir à inverser la tendance et gagner 5 points de compétitivité en fruits et légumes en 2030 et 10 points en 2035. Le gouvernement met sur la table 200 millions d’euros dès cette année 2023, dont 100 millions d’euros pour les agroéquipements.

Le constat de la baisse de compétitivité des filières fruits et légumes est déjà bien connu, tout comme les raisons. Impasses phytosanitaires particulièrement criantes dans cette filière, entraînant des distorsions de concurrence avec les autres pays européens, sensibilité au changement climatique dans un contexte de sécheresses à répétition et d’évènements climatiques de plus en plus extrêmes, à l’image des gels tardifs, coût de la main-d’œuvre, difficulté à recruter, etc.

Face à ces constats, le plan gouvernemental prévoit notamment de faciliter les extensions d’autorisation de mise sur le marché (AMM) pour les usages mineurs, ainsi que de moderniser les outils de production en finançant des équipements comme des robots ou des sites de stockage plus performants. Il vise aussi à rénover le parc de serres vieillissant afin de limiter les charges énergétiques, et à créer de nouvelles serres froides ou serres chauffées décarbonées.

Reste les problématiques de l’installation et du revenu des producteurs, non abordées dans le plan. Ainsi que cette question : face à une féroce concurrence des prix, comment inciter les consommateurs à choisir des produits français plutôt que des produits importés ?