Consommation : les fruits et légumes dans le vert mais le bio passe à l’orange

Selon Interfel, le confinement a déplafonné la consommation qui reste cependant en-deçà des recommandations sanitaires. L’interprofession alerte sur un ralentissement de la consommation de produits bio, imputable à la crise économique, alors que l’offre est attendue à la hausse sous l’effet des conversions.

« Après le frémissement observé en 2019, où la consommation de fruits et légumes frais avait progressé de 1%, 2020 devrait enregistrer une croissance d’environ 5%, déclare Laurent Grandin, président d’Interfel, l’interprofession des fruits et légumes frais, à l’occasion d’une conférence de presse le 26 janvier. Le chiffre définitif variera peut-être de plus ou moins 0,5% en fonction des scores enregistrés par la restauration commerciale, très pénalisée par la crise sanitaire, mais qui ne représente que 10% des volumes de fruits et légumes ».

La consommation de fruits et légumes frais aura ainsi progressé autant en une année qu’au cours des deux dernières décennies. Si les volumes progressent de 5%, la dépense des ménages a quant à elle bondi de 13%. Outre une réduction de l’offre sur les fruits à noyaux et à pépins, sous l’effet notamment du climat, Interfel y voit aussi un « effet EGAlim », avec la montée en gamme qui se matérialise par les signes de qualité, dont la HVE qui génère « un différentiel net », s’ajoutant à l’offre croissante en bio, dont la différence de prix oscille « entre 30% et 50% selon les produits et les périodes ».

Merci le confinement

Pour Interfel, les effets de la crise sanitaire et notamment le premier confinement, expliquent cette hausse subite de la consommation, sous l’effet du « fait maison ». L’interprofession n’a pas manqué d’accompagner le mouvement, d’abord en assurant l’approvisionnement des points de vente, ensuite par des campagnes d’information dans les médias et sur les réseaux sociaux.

"Il ne s’agit pas de transformer les fruits et légumes en médicaments."

Toutefois, les niveaux de consommation des ménages français restent inférieurs aux recommandations du Programme national nutrition santé (PNNS), qui fixe à 400 g/jour la ration cible de fruits et légumes frais alors qu’elle s’établit à 323 g/jour selon Interfel, 360 g/jour selon les données du Credoc incluant les produits transformés. « La consommation de fruits et légumes, sous toutes ses formes, reste insuffisante par rapport aux objectifs de santé, poursuit Laurent Grandin. Nous devons poursuivre notre travail, mais avant tout pour une question de plaisir, car il ne s’agit pas de transformer les fruits et légumes en médicaments, mais aussi pour des questions liées à la santé ».

Jeunes et publics défavorisés

L’interprofession poursuit ses actions de vulgarisation auprès des publics les moins enclins à consommer des fruits et légumes frais que sont les enfants et les personnes défavorisées. « C’est une priorité et une urgence en terme de santé publique, confirme Christel Teyssedre, présidente d’Aprifel, l’Agence pour la recherche et l’information fruits et légumes. « Chez les personnes bénéficiaires de l’aide alimentaire, la prévalence de l’obésité est 1,5 fois plus forte que dans l’ensemble de la population ». L'agence souligne que l'Union européenne anticipe une épidémie d'obésité à l'horizon 2035.

"Oui au chèque alimentaire mais pas réservé aux Amap et au bio."

En 2021, l’Aprifel va outiller 10 000 professionnels de santé en kits pédagogiques, 15% des médecins (généralistes, pédiatres, gynécologues...) ayant déjà été approchés au cours des années passées. En juin, ce sont les établissements scolaires qui seront visés avec des kits destinés aux enseignants, des animations assurées par des diététiciens et des actions sur les réseaux sociaux. « Il est tout de même regrettable de laisser sur la table 15 millions d’euros issus du programme européen fruits et légumes à l’école, s’agace Laurent Grandin. C’est une aberration du point de vue des sommes concernées et des possibilités de financer l’amélioration qualitative des produits mais aussi les volumes. Quant au projet de chèque alimentaire, c’est une initiative que nous soutenons mais à condition qu’elle ne soit pas réservée aux Amap et au bio ».

Le bio en retrait de 1% au troisième trimestre

A propos de la filière bio, Interfel a indiqué que la consommation avait enregistré une baisse de 1% au troisième trimestre 2020. « Il y a une forme de suspension de la consommation liée à la crise économique à venir, analyse Laurent Grandin. C’est un point de vigilance car l’offre va encore s’accroitre sensiblement sous l’effet des conversions, au point de risquer d’être surabondante par rapport à la demande. Nous alertons les pouvoirs publics afin de trouver l’adéquation entre les mesures d’encouragement de la production d'une part et la consommation d'autre part ».

Selon Interfel, la consommation de fruits et légumes bio devrait toutefois croître de 5% en 2020, après des rythmes de 7% à 8% les années précédentes, portés par les consommateurs historiques et les catégories socio-professionnelles supérieures. Le bio représente actuellement 10% du secteur.