Et la ferme préférée des Français est...

[Edito] ... une exploitation du Gers produisant des cosmétiques bio ! Un an après la razzia dans les supermarchés pour cause de pandémie et de crainte de pénurie alimentaire, les produits non essentiels se refont une place en tête de gondole. Un bon signe ?

Au menu de l’émission de France3, « La ferme préférée des Français », il y avait de la charcuterie corse, des huitres bretonnes, du vin d’Alsace produit en biodynamie, de la viande bovine du Limousin, des champignons, des légumes bio, du cresson, du reblochon, du thé de La Réunion. Bref, un plateau télé des plus alléchants, servi par Stéphane Bern, ardent défenseur de notre patrimoine national. On pourra d’ailleurs bientôt en manger du Stéphane Bern, du nom du jeune veau Hereford ainsi baptisé par la Ferme de Gorce en Charente, classée 5ème par les votants. On pourra l’accompagner des pâtes bio que la Ferme des Mions Nord (classée 3ème) produit dans le département du Nord, ces pâtes dont on a craint la rupture d’approvisionnement il y a tout juste un an, quand le Salon de l’agriculture fermait ses portes prématurément et avant que la France ne soit claquemurée pendant deux mois pour cause d’épidémie de coronavirus.

Les téléspectateurs qui, pour l’émission, avaient été invités à voter sur internet parmi une sélection de quatorze exploitations, ont finalement choisi la Ferme du Hitton. Située dans le Gers, elle produit des herbes aromatiques et du lait d’ânesses des Pyrénées, à la base de toute une gamme de cosmétiques bio.

« La guerre de l’eau », ou le retour à la normale sur France 2

La prédilection de nos concitoyens pour des produits non alimentaires et non essentiels augure peut-être la fin d’une parenthèse désenchantée due au Covid. Espérons qu’elle n’occulte pas totalement la « reconnaissance du ventre » et ce besoin primaire que l’épidémie a ravivé dans notre société rompue à l’opulence alimentaire. Une opulence toute relative, au regard des trous dans la fourchette, côté production, et des fins de mois difficiles pour beaucoup, y compris au sein de la population agricole, côté consommation.

La trêve fut de courte durée. Vingt-quatre heures après la diffusion de « La ferme préférée », France 2 prenait le relais de cette séquence médiatique que l’agriculture monopolise traditionnellement au moment du Salon de l’agriculture. Le sujet, tel que l’émission « Envoyé spécial » les affectionne, était beaucoup plus clivant. Au menu : la « guerre de l’eau » livrée par des défenseurs de l’environnement à des agriculteurs désireux de sécuriser leur production (et nos assiettes), par la création de ressources en eau. Ici dans les Deux-Sèvres avec le projet de création de réserves de substitution, là dans le Lot-et-Garonne avec l’inauguration récente, mais non officielle et pour cause, du lac de Caussade. Après le consensuel et plébiscité documentaire « Nous Paysans », une forme de retour à la normale.