Il faut sauver la sole de colza

[Edito] Après le sauvetage des betteraves, le colza sera-t-il la grande cause culturale de la prochaine campagne ? Rien n’est moins sûr. Il faudra moins mobiliser le politique et la chimie que l’agronomie pour sauver la tête d’assolement. A commencer par le test bêche.

Entre décembre 2020 et juin 2021, 140.000 ha de colza ont disparu de la nature. Ils ont été remplacés par des cultures de printemps du fait de potentiels de rendement jugés bien trop faibles. Difficile de faire pire publicité pour une culture déjà bien à la peine depuis quelques années. Selon le Service de la statistique et de la prospective du ministère de l’Agriculture, le colza couvre cette année 0,984 millions ha, soit une baisse de plus de 11% par rapport à la campagne précédente et de plus de 27% par rapport à la moyenne quinquennale. La production de graines devrait passer sous les 3 millions de tonnes, une première depuis 20 ans, en dépit d’un rendement moyen escompté de 30 q/ha.

Le colza n’est pas la betterave

Depuis quelques années, l’oléagineux subit les assauts du climat et des ravageurs, hypothéquant l’avenir d’une tête d’assolement, indispensable pour de nombreux céréaliers, notamment dans les sols superficiels, et au-delà pour toute une filière si l’on songe aux débouchés de l’huile et des tourteaux. Les difficultés croissantes d’implantation, liées aux épisodes de sécheresse, accentuent la sensibilité de l’espèce aux ravageurs, toujours plus nombreux à s’en délecter. « Le colza, c’est une plante qui choppe tous les ravageurs possibles et imaginables tout au long de la l’année, de semis à la formation des siliques », déclare Clément Le Roux, chef d’exploitation de TerraLab à Betheny (Marne).

Dix ans après l’autorisation du Cruiser et neuf ans après son retrait, il ne faudra pas compter sur un retour des néonicotinoïdes. La problématique en colza est à bien des égards différente de celle de la betterave. Le phosmet a tout de même obtenu un sursis européen pour la prochaine campagne.

Du Covid au colza, d’un test à l’autre

TerraLab, c’est la ferme expérimentale des Chambres d’agriculture du Grand Est, qui accueillait cette semaine la 15ème édition des Culturales, organisées par Arvalis. La Région est justement la plus affectée par le déclin du colza. L’occasion pour Terres Inovia de réaffirmer qu’il n’y a pas de fatalité. « On a des années difficiles mais les situations objectives où il est impossible de faire lever du colza sont en réalité peu nombreuses », affirme Stéphane Cadoux, chargé d’études sur les systèmes de culture.

Durant trois jours, les ingénieurs de Terre Inovia se sont escrimés à armer et réarmer les visiteurs, à coups de variétés et densités adaptées, de semis précoce, de fertilisation organique, de plantes compagne, de tests Berlèse, etc.

A la veille du 18 juin, ils ont également lancé un appel, consistant à réaliser dès maintenant des tests bêche dans les parcelles susceptibles d’être implantées en colza, de façon à jauger la structuration du sol et sa prédisposition à l’espèce, avec ou sans façon culturale, afin de ménager la fraicheur et de saisir toutes les opportunités de semis, en lien avec la météo. Malheureusement, les conditions sanitaires ont pesé sur la fréquentation des Culturales, la nécessité de procéder à un test, à défaut de pass sanitaire, ayant sans doute dissuadé certains visiteurs. Le test bêche, c’est sans carte Vitale mais c’est bel et bien le pass vital pour ne pas faire l’impasse sur le colza.