Label bas carbone : jouer sur les engrais pour limiter les gaz à effet de serre.

L’utilisation d’engrais azoté d’origine minérale représente le deuxième poste d’émission de gaz à effet de serre (GES) en agriculture. La méthode Label Bas Carbone grandes cultures prévoit des leviers pour réduire ces émissions en jouant sur les formes d’engrais utilisés, en utilisant notamment de l’urée protégée ou inhibée.

Si le rôle du méthane dans les émissions de gaz à effet de serre du secteur agricole est bien connu, c’est moins le cas du protoxyde d’azote. Ce gaz émis par volatilisation lors de l’épandage d’engrais azoté possède un potentiel de réchauffement environ 270 fois plus important que le CO². En système grandes cultures, il représente un levier primordial pour réduire les émissions de GES du secteur, bien plus efficace que la réduction de la consommation de GNR, dont la part totale dans les émissions agricoles ne dépassent pas les 10 %.

Pour actionner ce levier, la première étape passe par la sensibilisation des producteurs. C’est l’un des rôles de Rémi Taysse, conseiller Agronomie au sein du CerFrance Vendée, qui accompagne les agriculteurs dans leur démarche de diagnostic carbone. « Lors du premier rendez-vous, je détaille les émissions de GES en agriculture dont le N2O. Généralement, ils sont au courant de la volatilisation de l’engrais mais sans se rendre compte de l’importance de ce gaz. Après cette première approche, ils saisissent très vite » rapporte-t-il.

Gaz à effet de serre, se tourner vers l'urée protégée

Pour réduire les émissions de protoxyde d’azote, l’une des solutions possibles est l’utilisation d’urée protégé ou inhibée. La méthode Label Bas Carbone (LBC) grandes cultures, prévoit ainsi un gain de 317 kgeqCo²/ha/an en cas d’utilisation d'un inhibiteur de nitrification.

En Vendée, Fabrice Bonnet, associé sur un Gaec qui produit du lait de chèvre et une centaine d'hectares de cultures céréalières a testé durant une campagne ce type d’engrais. « Nous aimons bien utiliser des engrais qui durent dans le temps » évoque-t-il. Cette année-là, il fait son premier apport d’urée protégée le 20 mars, soit un peu plus tôt que l’itinéraire cultural classique. « Pour l’urée protégée c’était déjà trop tard. Il faut lui laisser le temps de se libérer. Il aurait fallu que je passe dix jours plus tôt. Heureusement c’était le premier passage. Si cela était arrivé sur le deuxième passage, la culture aurait été trop avancée quand l’azote aurait été disponible » souligne-t-il. Pour autant les résultats sont là. Le blé atteint les 70 q/ha, l’objectif que se fixe chaque année les associés du Gaec. « C’est une solution qui était un peu plus cher mais qui reste correct en terme de coût » assure le producteur.

Pour Rémi Taysse, l’intérêt de l’urée protégée ne s’arrête pas à l’aspect environnemental. « La transformation de la forme uréique vers l’ammonium se fait plus lentement. L’azote est disponible sur une plus longue durée à des doses plus adaptées ».

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Rémy Taysse - Conseiller agronome - Cerfrance Vendée

Cette disponibilité différée est particulièrement intéressante pour certaines cultures. Il évoque le cas du maïs dont le besoin en azote est important au stade 10 feuilles, alors que l’apport d’engrais se fait avant le fermeture du rang entre 4 et 10 feuilles, voire au semis. « En réduisant la volatilisation, il y aussi un aspect économique car l’agriculteur perd moins d’engrais » ajoute-t-il.

Ammonitrate et enfouissement

Pour réduire les émissions de GES liées au N2O, d’autres pistes existent. L’enfouissement en est une. La méthode LBC grandes cultures calcule un gain d’émission de GES de l’ordre de 219 kgeqCO²/ha/an pour l’activation de ce levier.

L’utilisation d’ammonitrate en lieu et place de l’urée est également reconnue par la méthode LBC du ministère de l’agriculture. Elle représente une réduction des émissions de GES de l’ordre de 114 kgeqCO²/ha/an pour la substitution de 100kgN d’urée par 100kgN d’ammonitrate.

De manière évidente, la réduction de l’apport d’engrais minéral azoté entraîne également une diminution des émissions de CO². Elle est chiffrée à hauteur de 12,7kgeqCO²/kgN. Ce calcul prend en compte l’utilisation au champ, mais aussi la fabrication de l’engrais. Selon la méthode LBC grandes cultures, plusieurs leviers sont actionnables sur ce sujet. Il s’agit par exemple d’un ajustement du calcul de dose prévisionnel en fonction d’objectifs de rendement réalisable. Cela passe également par la prise en compte des conditions climatiques pour le déclenchement des apports ou encore l’utilisation d’outil de pilotage ou de modulation intraparcellaire.

Le CerFrance Vendée accompagne les exploitants vers les crédits carbone

Depuis 3 ans, le CerFrance Vendée propose d’accompagner ses clients dans un diagnostic carbone. Si les éleveurs ont été les premiers à franchir le pas avec une vingtaine d'engagés dans les appels à projet, notamment de France Carbon Agri, les céréaliers leur emboîtent le pas. « Nous avons commencé cette année des diagnostics carbones en grandes cultures avec les outils CAP2ER et SysFarm. Nous allons avoir 3 exploitants engagés dans l’appel à projet à venir de France Carbon Agri » détaille Rémi Taysse.