Les saccages au nom de l’écologie

[Edito] Au nom de l’écologie, des activistes s’en sont pris près de Nantes à des serres expérimentant des légumes… en agroécologie. Un sabotage qui soulève colère et incompréhension.

« Que brûle l’agro-industrie » : le 11 juin dernier, c’est ce qui a été tagué sur les bâches abritant des parcelles expérimentales en agroécologie, à la Fédération des Maraîchers Nantais. Lesdites bâches ont été lacérées, les tableaux électriques et les systèmes de goutte-à-goutte détruits, les cultures arrachées. Une autre action a consisté à arracher une parcelle de muguet chez un producteur quelques kilomètres plus loin et à la remplacer par des semences paysannes de sarrasin.

Ces saccages ont eu lieu dans le cadre d’une manifestation organisée par de nombreuses organisations écologistes contre « l’extension des carrières de sable », « le maraîchage industriel » et « la surconsommation de béton ». Le parti Europe Ecologie les Verts, dont plusieurs élus étaient présents, n’a pas condamné les actes de vandalisme. Le collectif co-organisateur Les Soulèvements de la Terre, qui revendique le recours au sabotage, s’était déjà illustré lors de la manifestation contre la retenue d’eau de Sainte-Soline (Deux-Sèvres) le 25 mars, qui avait donné lieu à de violents affrontements. Trois jours plus tard, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin annonçait avoir engagé la procédure de dissolution du groupe. Le décret gouvernemental n'a pas encore été signé. Cependant, il ne s’agit pas d’une association, mais d’un groupement hétérogène de différents collectifs, ce qui place le gouvernement face à un casse-tête juridique.

Les militants dénoncent « l’agro-industrie », en opposition avec « une agriculture paysanne ». Mais comme toujours, tout n’est pas tout noir ou tout blanc. Les Maraîchers Nantais sont conscients des progrès à accomplir pour aller vers la transition agroécologique. Les parcelles expérimentales détruites étaient justement dédiées à la recherche de pratiques moins gourmandes en intrants. Mais alors que la production de fruits et légumes français est en baisse depuis 20 ans, et que nous importons la moitié de notre consommation, ces saccages soulèvent colère et incompréhension. Les projets d’infrastructures, qu’ils soient agricoles, routiers, industriels, font de plus en plus souvent l’objet de contestations citoyennes, parfois violentes. Or, à l’heure où la volonté politique est à la relocalisation des industries en France, le risque est grand de voir se multiplier les actes radicaux de la sorte.