"les vrais du faux" la forêt expliquée sans langue de bois

Comme l’agriculture, la filière forêt-bois est sujette à des critiques et contre-vérités que la fédération nationale des syndicats des forestiers privés détricote dans un fascicule pédagogique.

Trente-six : c’est le nombre d’idées reçues (soit pas moins de trois par mois) sur la forêt et le bois auxquelles les propriétaires forestiers privés représentés par Fransylva ont décidé de tordre le coup dans un fascicule diffusé cette fin d’année.

La forêt progresse

Voilà justement une idée largement répandue : la forêt française serait en proie à la déforestation. Faux ! La surface de la forêt en France métropolitaine a en effet plus que doublé en 200 ans, passant de 8,9 millions d’hectares (Mha) en 1840 à 14,1 Mha en 1985 puis 16,8 Mha en 2018. Elle couvre ainsi aujourd’hui plus de 30 % du territoire hexagonal (autant que la part des terres émergées recouvertes de forêts à travers le monde), faisant de la France le quatrième pays européen le plus boisé derrière la Finlande, la Suède et l’Espagne.
Mais au fait à qui appartient la forêt française ? À tout le monde, c’est un bien commun... Que nenni ! Les trois quarts de la forêt française (soit 3,5 Mha) sont privés, et seuls leurs propriétaires en assument la responsabilité et la gestion le plus souvent sur plusieurs générations. Par conséquent, l’accès à une forêt privée est soumis à l’autorisation du propriétaire et ce dernier est libre d’en fermer l’accès, tout particulièrement en cas de chantier forestier ou de jour de chasse. “L’interdiction de pénétrer dans une forêt est généralement la conséquence du non respect des règles de bonne conduite les plus élémentaires, écrit Fransylva : dépôt d’ordures, abandon de déchets, feux, pollution sonore, baignades dangereuses, détérioration de chemins avec des engins motorisés...”
La forêt française serait sur-exploitée : là encore une information erronée. Chaque année, on ne récolte en effet que 58 % de la matière bois produite par les forêts françaises (chiffre 2018, source IGN). Certaines forêts souffrent ainsi parfois de sous-exploitation : vieillissantes, non entretenues, elles deviennent plus sensibles aux intempéries et maladies ainsi qu’au risque d’incendies.

Pas de massacre à la tronçonneuse...


Les coupes rases, une aberration écologique ! Encore faux ! En gestion forestière, cette pratique, en vigueur depuis des siècles, correspond à la phase de récolte d’arbres d’âge et de dimension sensiblement identiques sur le même parcelle (futaie régulière). Certes d’un point de vue paysager, pendant quelques mois et jusqu’à la mise en place de la régénération, la coupe rase peut choquer, pour autant des semis sont souvent déjà présents et les reboisements après ces coupes permettent de développer une faune et une flore importantes, typiques des milieux ouverts qui n’existaient plus dans la forêt adulte. Plus globalement, Fransylva rappelle que la coupe est un acte fondamental en forêt, destiné à accélérer les processus naturels de concurrence et sénescence, dans un objectif de production de bois de qualité. “Il s’agit de procéder à un prélèvement intelligent des arbres pour favoriser leur croissance ou leur renouvellement”, indique Fransylva, évoquant aussi la nécessité de coupes sanitaires pour récolter des arbres endommagés par des tempêtes, des insectes ravageurs, des sécheresses...

72 % de feuillus


La vox populi voudrait aussi que la majorité des plantations soient faites en résineux. Pour le coup, c’est vrai : en France,
80 % des forêts plantées (soit 13 % de la surface forestière) sont en résineux (douglas, épicéa, pin laricio et pin maritime).
De manière générale, les feuillus croissent plus vite, avec une meilleure capacité à valoriser les terrains pauvres, ce qui peut être un atout face au changement climatique. Les feuillus sont eux majoritairement renouvelés par régénération naturelle.

Quid des débouchés ? La majorité des chênes français partent-ils vraiment en Chine comme nombreux le prétendent ? Faux : entre 2019 et 2022, on estime à 20 % la part de chênes récoltés en France vendus à l’export, dont une bonne partie en Chine. Il s’agit principalement de chênes de seconde qualité. Il convient également de noter que faute de transformateurs, d’autres essences ne trouvent pas toujours preneurs sur le territoire et sont exportées, tels les frênes, hêtres...
Autre critique adressée à la filière : les crédits carbone issus du reboisement seraient du greenwashing(1). Faux, rétorque Fransylva. Le label bas-carbone, lancé par le gouvernement en 2019, permet en effet de certifier des projets de séquestration carbone ; pour en bénéficier, il faut, entre autres, disposer d’un document de gestion durable et prouver que son projet de reboisement ou d’amélioration permet de capter davantage de carbone. Ces projets sont tous validés par le ministère de la Transition écologique et un contrôle sur le terrain a lieu cinq ans après les travaux.

Mais au final, est-ce bien raisonnable de continuer à lire ces lignes imprimées sur du papier dont la production nécessiterait de “détruire la forêt”. Aucune inquiétude : en France, on ne coupe pas d’arbres adultes pour produire du papier. Ce dernier est constitué de fibres de bois, provenant essentiellement de coupes d’éclaircies (coupes d’entretien) et est issu essentiellement de forêts gérées durablement, c’est le cas du papier de L’union du Cantal.

(1) Stratégie marketing consistant à communiquer en utilisant l’argument
écologique.
Source : “36 idées reçues sur la forêt et le bois”, édité par Fransylva.