Revenu/grandes cultures : « Nous nous sommes toujours adaptés, mais je suis plus inquiet qu’avant »

Yves Bollé, agriculteur à Cambronne-lès-Clermont, dans l’Oise, a vu sa situation économique se dégrader depuis le début des années 2000. Il a dû développer des activités de diversification pour maintenir son revenu, au prix d’une charge de travail conséquente.

Chez Yves Bollé, 2016 avait été une année difficile, entraînant des reports d’annuités et des emprunts supplémentaires. Et 2020 est survenue alors que tout n’était pas encore épongé. « Cette année est pire que 2016, car c’est la catastrophe sur toutes les cultures », explique l’agriculteur de 59 ans. Il le reconnaît : « J’arrive en fin de carrière, fatigué de me battre pour rester debout face à tous les obstacles, malgré la passion pour ce métier. »

Installé depuis 1982, Yves Bollé a vu la situation se dégrader fortement depuis une vingtaine d’années. « Nous avions diversifié notre activité au début des années 1990 avec la vente de sapins de Noël, raconte-t-il. Puis j’ai monté une société de vente de pailles et de fourrages pour les centres équestres et les particuliers. C’est beaucoup de travail afin de maintenir un revenu. »

« Tous les ans, on nous grignote les DPB »

Sur la ferme, tout se passait bien jusqu’au début des années 2000, puis « le prix des intrants et du matériel ont explosé, tandis que les prix des céréales n’ont pas évolué ». S’y est ajoutée la diminution des aides PAC. « Tous les ans, on nous grignote les DPB. Ce n’est pas normal. Les aides étaient au départ des aides compensatoires, afin de compenser le fait que nos produits devaient être vendus aux cours mondiaux. On est toujours au cours mondial, mais les aides baissent. Les promesses n’ont pas été tenues. »

À ces questions économiques s’ajoute un contexte de contraintes administratives. « Nous subissons une pression de l’administration pour implanter des couverts SIE alors que c’est techniquement impossible. On se pose en permanence la question de savoir ce que l’on a le droit de faire, qu’il s’agisse des épandages ou du broyage. Ça complique fortement l’organisation du travail. »

« Nous manquons d’outils pour gérer les énormes fluctuations »

Le moment de passer le flambeau à sa fille approche. « Pourra-t-elle reprendre ? Ne sera-t-elle pas obligée de conserver une activité à l’extérieur, au moins tant que je pourrai aider sur la ferme, s’interroge Yves Bollé. Et faudra-t-il diversifier un peu plus l’activité si le revenu dégagé par les cultures alimentaires reste insuffisant, notamment pour faire face aux nécessaires emprunts qu’implique l’installation ? Nous manquons d’outils pour gérer les énormes fluctuations de nos ressources et sécuriser une trésorerie long terme. Le monde agricole s’est toujours adapté, mais là, je suis plus inquiet qu’auparavant. »

SAU de 218 ha (blé, betteraves, pommes de terre, escourgeon, avoine, tournesol, maïs).