Semae et les semences fermières : une dormance pas encore levée

Alors que l’ex-Gnis a décidé de s’ouvrir à tous les acteurs et à toutes les formes de semences, la Coordination nationale pour la défense des semences fermières (CNDSF) attend toujours de savoir si Semae lui réservera une place au collège des producteurs, en plus de siéger à la nouvelle section « diversité des semences et des plants ».

Le 27 janvier dernier, l’interprofession des semences et plants présentait son projet stratégique visant, entre autres engagements, à s’ouvrir à l’ensemble des acteurs de la filière, dont les producteurs de semences fermières. Quelques semaines plus tard, les organisations visées, à commencer par la Coordination nationale pour la défense des semences fermières (CNDSF), attendent toujours leur carton d’invitation. « Les paroles n’ont pas encore été suivies d’actes », explique son président Philippe Ribault, à l’occasion d’une journée de démonstration organisée dans le Lot-et-Garonne et donnant à voir la technicité et le professionnalisme des trieurs à façon.

Une journée à laquelle a participé Pierre Pagès, vice-président de Semae. « Ma présence à vos côtés témoigne d’un changement d’époque, a déclaré le responsable professionnel, sous le hangar d’un adhérent du Modef, entre deux stations de triage mécaniques et optiques des entreprises Cereti et Denis. Tout un symbole. L’interprofession avait peu évolué en 60 ans d’existence. Un tel changement suppose une adaptation de nos structures opérationnelles. Ce nouveau schéma d’organisation est encore en chantier. Notre volonté de mener cette petite révolution jusqu’à son terme reste entière ».

Philippe Ribault, président de la Coordination nationale pour la défense des semences fermières (CNDSF)
Philippe Ribault, président de la Coordination nationale pour la défense des semences fermières (CNDSF)

Quid du collège des producteurs

A l’annonce de la création de Semae et de son projet stratégique, la Confédération paysanne, qui dispose statutairement d’un siège au conseil d’administration de l’interprofession, aux côtés de la Coordination rurale et des syndicats majoritaires, avait dénoncé un « ravalement de façade et une ouverture en trompe-l’œil ». « Depuis le 27 janvier, on est sans nouvelle de Semae, c’est un peu surprenant, déclare Denis Perreau, porte-parole de la CNDSF et secrétaire national de la confédération paysanne. En tant que producteurs de semences fermières, nous revendiquons une place au collège des producteurs de semences, et pas seulement en tant qu’utilisateurs ou au sein de la nouvelle section dédiée à la diversité des semences et des plants ».

« Sur le fond, il n’y a pas de frein à accueillir les acteurs de la semence fermière, temporise Pierre Pagès. La question, c’est de savoir, au regard des acteurs et de leurs activités, quel collège ils sont potentiellement susceptibles d’intégrer. Cela reste à construire collectivement ».

Les acteurs des semences fermières estiment que leurs activités, par leurs performances et leur compétitivité, peuvent contribuer à atteindre l’objectif d’autonomie protéique
Les acteurs des semences fermières estiment que leurs activités, par leurs performances et leur compétitivité, peuvent contribuer à atteindre l’objectif d’autonomie protéique

Deux lignes rouges

Les semaines et les mois à venir devraient donner lieu à des avancées entre les différentes parties prenantes, dont la CNDSF et le Syndicat des trieurs à façon français (Staff). Lorsque le cadre sera fixé et la place des uns et des autres clairement définie, Semae devrait constituer un lieu de débats, en lieu et place des confrontations par médias interposés, sans pour autant annihiler les points de discorde, voire de franche opposition.

Le jour où la CNDSF organisait à Lacepède (Lot-et-Garonne) sa démonstration de triage de semences de soja, gesse et autres féverole, un groupe de faucheurs volontaires éventrait des sacs de semences de colza et de tournesol dans des locaux de la coopérative Arterris dans l’Aude. Une ligne rouge pour Semae comme le sont  tout autant les NBT (New breeding technologies) pour la Confédération paysanne.