Une transition à 9 milliards d'euros pour la Coopération agricole

Au-delà de l’effet de levier du Plan de relance, la coopération agricole souhaite un soutien massif des pouvoirs publics sur le long terme pour supporter le coût des transitions écologique et climatique. En attendant, la crise sanitaire siphonne les fonds propres des entreprises tandis que la grande distribution entame les négociations commerciales en réclamant des baisses de prix comprises entre -2% et -4%. La coopération campe sur +2% à +4%.

Plan de relance, baisse des impôts de production, crédit d’impôt accordé à la certification Haute valeur environnementale (HVE) : la Coopération agricole ne sous-estime pas les moyens mis sur la table par le gouvernement pour passer la crise sanitaire et prévenir une potentielle crise écologique et climatique.

Mais elle en réclame davantage. « Le Plan de relance va produire un effet de levier sur les années 2021 et 2022 mais la transformation de nos modèles économiques et écologiques, s’agissant notamment de la décarbonation, s’inscrit sur une période de 5 à 10 ans, déclare Dominique Chargé, président de la Coopération agricole, à l’occasion d’une conférence de presse. Selon nos calculs, les agriculteurs et les coopératives vont devoir mobiliser 9 milliards d’euros pour financer la transition, dans un rapport deux tiers / un tiers. C’est six fois plus que les montants actuellement fléchés sur ce dossier. Nous en appelons au soutien massif des pouvoirs publics ».

"Il n’y aura pas de transformation de nos modèles s’il n’y a pas de compétitivité "

La Coopération agricole a bien tenté de faire passer une première enveloppe de 300 millions d'euros sur le projet de loi de finances 2021 mais la partie est mal engagée. « A défaut, nous réitérerons notre demande pour 2022 », a plaidé Dominique Chargé.

Les coopératives et leurs adhérents ne s’estiment pas capables de supporter seuls la charge de la transition, même si le processus est déjà engagé, comme en témoigne la filière luzerne, citée en exemple. « Il y a quelques années en arrière, la filière était émettrice nette de carbone, souligne Dominique Chargé. Grâce au préfanage et au recours à la biomasse dans les usines de déshydratation, la luzerne stocke désormais plus de carbone qu’elle n’en émet ».

Problème : la transition ne représente qu’une partie des défis de la coopération, qui doit par ailleurs continuer d’investir dans la modernisation de ses outils productifs. « Il n’y aura pas de transformation de nos modèles s’il n’y a pas de compétitivité », a martelé le président, prenant comme exemple la betterave, soudainement soumise à une « distorsion de concurrence sous l’effet d’un retrait de molécules, sans alternatives techniques fiables et économiquement viables ».

« La guerre des prix est repartie »

Pour d’autres filières, telles que les vins et spiritueux, le foie gras et les volailles festives, c’est la crise sanitaire qui plombe les trésoreries et les fonds propres, et hypothèquent d’autant les processus de transformation des entreprises agricoles et agroalimentaires.

Et alors que s’ouvrent les négociations commerciales, la grande distribution enfonce le clou. « C’est le retour de la guerre des prix, déclare Dominique Chargé. On fait face à une demande quasi généralisée de déflation de la part des distributeurs de -2% à -4% alors que l’on aurait besoin d’une revalorisation de 2% à 4%, notamment pour tenir compte de la hausse des prix des matières premières. Les demandes de promotion sont aussi très importantes. Le contexte social est certes difficile mais il y la nécessité impérative de revaloriser les tarifs des fournisseurs pour assurer la juste rémunération des producteurs ». Pour la Coopération agricole, la loi EGAlim n’a toujours pas produit ses effets.