Vautours: le même schéma que pour le loup il y a une dizaine d'années

Samuel Maymard représente la FDSEA " C’est parfois difficile à vivre quand on est éleveur d’évoquer le vautour parce que c’est une espèce ultra-protégée et nombre de participants au comité départemental, semblent pro-vautours.

Les interactions entre les vautours et les animaux d’élevage dans le département se multiplient ces dernières années. Initialement concentrées dans le sud du département, les consommations d’animaux ont été également constatées sur le Lévézou et le Ségala ainsi que sur l’Aubrac. La récurrence de ces dommages qui sèment l’inquiétude chez les éleveurs, a conduit à l a mise en place d’un comité départemental « Vautours fauves et élevages » qui réunit l’ensemble des acteurs concernés, sous l’égide de l’Etat. Eleveurs, associations environnementales, vétérinaires, services de l’Etat, O F B. échangent régulièrement depuis 2020 et font remonter leurs positions respectives sur la question. La Volonté Paysanne a rencontré ses participants, lors du dernier comité réuni en décembre, afin de faire un point d’étape sur la gestion de la problématique vautour - élevage dans le département.

Un plan national pour mieux gérer

Le plan national d’action «Vautour fauve et activités d’élevage» dont la DREA La Nouvelle Aquitaine est coordinatrice et la LPO G rands Causses l’animatrice, vise à définir les actions nécessaires à la conservation et à la restauration des espèces les plus menacées afin de s’assurer de leur bon état de conservation.

Un comité départemental pour échanger

A l’échelle de l’Aveyron, face à la récurrence des dommages sur les animaux d’élevages suite à des interactions avec des vautours, dans le sud du département comme sur l’Aubrac et face à l’inquiétude du monde agricole, les services de l’Etat ont mis en place un comité départemental « Vautours fauves et élevages ».

« Nous voulons faciliter les échanges entre les différents intervenants, les éleveurs et la profession agricole, représentés par les OPA, le syndicalisme, la Chambre d’agriculture, la préfecture, la DDT, la DDETSPP, l’Office français de la biodiversité, la LPO Grands Causses, les deux Parcs naturels régionaux (Aubrac et Grands Causses), la profession vétérinaire... Anne Calmet. « Notre rôle est d’écouter les préoccupations des éleveurs sachant le poids économique primordial de l’élevage dans le département et de garantir la préservation d’une espèce protégée ». « La première mission est de mieux connaître le comportement de cette espèce pour mettre en œuvre des actions comme par exemple, des mesures de prévention autour des points d’abreuvement des animaux pour que l’eau ne soit pas souillée par les vautours », cite la représentante de l’Etat.

Que faire en cas d’interaction d’un vautour sur ses animaux ?

Un numéro de téléphone, géré par la DDT, est dédié aux interactions entre les vautours fauves et le bétail. Il est réservé aux éleveurs et accessible 7 jours sur 7, 24h sur 24 : 05 65 73 50 89. Il permet une prise en charge rapide des signalements qui sont ensuite transmis aux agents de l’OFB qui reprend contact avec l’éleveur pour recueillir son témoignage « sans filtre ». A noter qu’un signalement d’un attroupement de vautours même sans interactions avec des animaux d’élevage, peut être réalisé à ce même numéro.

45 expertises terrain en 3 ans

Depuis 2021, 45 expertises vétérinaires ont été réalisées sur le terrain, suite à des signalements par les éleveurs d’interactions du vautour sur des bovins, des ovins, des caprins ou des équins. La majorité des interactions signalées sur les bovins montre que les mises-bas semblent représenter un moment de vulnérabilité du bétail et d’attractivité du vautour.

Sur les Causses et Cévennes, 920 couples ont été recensés (le vautour pond un œuf par an et par couple). Les vautours se nourrissant de cadavres d’animaux, leur population est donc fortement liée aux zones d’élevage.

Quelles mesures de prévention pour éviter l’intervention de vautours sur le bétail ?

- maintenir une vigilance accrue en période de sensibilité du bétail (notamment au moment des mises bas), - favoriser si possible la présence humaine et/ ou d’un chien de troupeau, - soustraire à la vue des vautours, les animaux plus vulnérables, - retirer rapidement les dépouilles et restes d’animaux près des troupeaux, - ne pas laisser visibles les cadavres en attente d’enlèvement par l’équarrisseur - ne pas déposer de cadavre à destination des vautours en dehors des placettes d’équarrissage naturel autorisées par l’administration.

Quel coût pour l’éleveur ?

Les interventions des vétérinaires après signalement sont prises en charge par l’Etat. En revanche il n’existe pas d’indemnisation pour les éleveurs dont les animaux sont victimes d’interactions avec les vautours

Pas de prédateur pour le vautour

Etant les derniers maillons de la chaîne alimentaire, les vautours n’ont pas de prédateur. La régulation de la population passe par la ressource alimentaire.

La question des points d’abreuvement

Les vautours utilisent les réserves d’eau du bétail pour se laver, pour boire et bien souvent les troupeaux ne veulent plus boire à ces endroits. Plusieurs solutions de protection des points d’eau sont expérimentées, comme la mise en place de rubalise dans la Drôme ou des aménagements de protection autour des abreuvoirs par la LPO Grands Causses. « Pour l’instant, nous n’avons pas d’éléments probants sur la contamination bactériologique, virale ou parasitaire des points d’eau mais il est recommandé que les animaux d’élevage évitent de boire dans cette eau souillée», préconisent les services de l’Etat.

«Les éleveurs doivent continuer de se faire entendre»

Samuel Maymard représente la FDSEA au sein du comité départemental vautour. Il partage son ressenti d’éleveur : « C’est parfois difficile à vivre quand on est éleveur d’évoquer le vautour parce que c’est une espèce ultra-protégée et nombre de participants au comité départemental, semblent pro-vautours. Nous sommes dans le même schéma que pour le loup il y a une dizaine d’années...

Pour les vautours, on ne parle pas d’attaques, on ne parle pas de prédateur et pourtant notre constat sur le terrain est différent... Je regrette que notre parole d’éleveur ne soit pas prise en compte ! Lors du dernier comité en décembre, j’ai senti une écoute de ce que nous pouvions observer sur nos fermes. Dans un contexte très tendu pour les éleveurs, je pense qu’il faut apaiser le débat, les échanges.

Nous avons besoin d’écoute, d’échange pour que tout le monde comprenne bien nos positions. Il faut jouer la franchise dans les deux sens ! Quand j’étais gamin, j’étais content de voir un couple ou deux de vautours, aujourd’hui je suis content quand je n’en vois pas du tout. Les populations ont évolué, il faut en tenir compte ! Il n’y a pas non plus d’écoute sur le changement de comportement de l’espèce vautour. Sur la question des placettes, je pense que plus on leur donnera à manger, plus il y aura de vautours... Je pense que pour limiter les populations, il faut limiter les placettes pendant la période de reproduction, ce serait déjà un levier de régulation. Mais c’est un sujet délicat et difficile à aborder ! J’ai rencontré le médiateur de la LPO Grands Causses, un fils de paysan qui semble ouvert au dialogue, j’espère que nos échanges seront favorables. Il est venu à notre rencontre et c’est un bon point ! Il y a encore beaucoup à faire pour que les éleveurs se fassent entendre, nous continuerons donc de participer au comité départemental.