Après-Covid, Ukraine : constructeurs et concessionnaires au bord de la rupture

Selon Axema et le Sedima, la guerre en Ukraine exacerbe la hausse des prix et les difficultés d’approvisionnement, au point de menacer les entreprises du secteur, mais aussi les agriculteurs par ricochet. En germe, une menace supplémentaire pour la sécurité alimentaire.

Le prix de l’acier multiplié par trois en un an, des pénuries en composants hydrauliques et électroniques toujours plus marquées, des délais moyens de livraison de 19 semaines (contre 8 semaines en temps normal) et jusqu’à 30 semaines pour les tracteurs, l’impossibilité de garantir des prix et des délais de livraison, une inflation qui confine à l’insoutenabilité : telle est l’alerte lancée par les organisations représentatives des industriels (Axema) et des distributeurs (Sedima) de la filière agroéquipements.

"La non-livraison des matériels commandés à la date initialement prévue peut mettre en péril la bonne exécution du travail de la saison et hypothéquer les récoltes à venir"

Quand on sait qu’il y a parfois moins d’atomes crochus entre ces deux syndicats qu’entre un crochet d’attelage reliant un tracteur et une benne, l’initiative commune ajoute à la gravité ambiante. « La non-livraison des matériels commandés à la date initialement prévue peut mettre en péril la bonne exécution du travail de la saison et hypothéquer les récoltes à venir, dans un contexte de crise alimentaire liée à la guerre en Ukraine : semer, récolter, vendanger, c’est tout une récolte qui peut être compromise », écrivent les deux organisations dans une lettre ouverte au gouvernement.

Un risque de désorganisation

La guerre en Ukraine a achevé d’exacerber une situation déjà sous très forte tension induite par la reprise économique mondiale en 2021, provoquant une hausse des tarifs des matériels comprise entre 10% et 15%, et succédant à une année d’atonie due la pandémie de Covid-19. Outre les difficultés d’approvisionnement, les constructeurs subissent la perte de débouchés en Ukraine et en Russie, qui représentent 4% de la valeur des exportations d’agroéquipements fabriqués en France (166 millions d’euros). La menace pèse aussi sur certains actifs stratégiques présents dans ces pays.

Du côté des concessionnaires, les dates de livraison à rallonge ont pour effet de déprécier la valeur des reprises, sinon de les contraindre à trouver des solutions alternatives de prêt complexes et coûteuses, le tout impactant « lourdement » l'équilibre financier des entreprises. « La trésorerie des entreprises est mise à mal, alors que beaucoup d’entre elles n’ont pas réussi à répercuter les hausses de coûts dans leurs prix en 2021 (...) Tous ces impacts ne manqueront pas à court terme d’engendrer un fort recul des ventes et désorganisera la production agricole », conclut la lettre.