Egalim 3, retraite : des réformes tout bénéfice pour les agriculteurs ?

[Edito] Téméraire, la majorité présidentielle remet Egalim sur le métier et fait sortir de ses gonds et de ses gondoles la grande distribution. Elle se risque aussi à une réforme impopulaire des retraites mais a priori bénéfique aux pensions les plus faibles. A voir.

En l’espace de quelques jours, la majorité présidentielle a ouvert deux fronts qui suscitent la défiance et la résistance de leurs cibles respectives. Le premier concerne la réforme des retraites et plus précisément la sauvegarde du système par répartition, que le gouvernement conditionne à un allongement (accéléré) de la durée des cotisations d’assurance vieillesse (de 168 à 172 trimestres) et de la vie active (de 62 ans à 64 ans), l’âge d’annulation de la décote restant fixé à 67 ans.

Selon la MSA, l’âge moyen de départ à la retraite des non-salariés agricoles s’établissait à 63,4 ans en 2020. Si le projet de réforme reste en l’état, l’effort demandé aux agriculteurs sera relatif, même s’il y a autant de situations et de ressentis que de futurs retraités.

Revalorisation pour certains retraités et futurs retraités

A contrario, les agriculteurs pourraient bénéficier d’une revalorisation de leur pension. Au nom de la « justice » et du « progrès », le projet de réforme prévoit en effet la mise en place d'un minimum de pension à 85 % du Smic net pour une carrière complète, soit près de 1200 euros par mois, équivalent à un bonus de 100 euros par mois. Selon le gouvernement, environ 45.000 agriculteurs aujourd’hui retraités bénéficieraient d’une revalorisation de l’ordre de 1000 euros par an. Ce qui laisse à penser que bon nombre vont y échapper... Le minimum de pension serait désormais indexé sur le Smic au moment du départ en retraite et non plus sur l’inflation.

Autant de mesures qui, après la revalorisation des retraites des conjoints collaborateurs et des petites retraites agricoles, témoignent tout de même de la bienveillance de la présidence Macron à l’égard des agriculteurs. En prime, les futurs retraités devraient pouvoir miser sur une revalorisation de leur pension liée à la prise en compte des 25 meilleures années, contre un calcul basé sur l’intégralité de leur carrière aujourd’hui. A condition que le Sénat entérine fin janvier le vote acquis à l’Assemblée nationale. Entre 250 et 300 euros par mois seraient en jeu, selon la FNSEA.

Panier anti-inflation ou anti-Egalim ?

A priori, les agriculteurs ne seraient donc pas les plus mal lotis d’une réforme qui fait à peu l’unanimité contre elle au sein des différentes centrales syndicales, Confédération paysanne et Modef compris, côté agricole.

Concernant l’autre front, celui des relations commerciales entre agriculteurs, industriels et distributeurs, ce sont les centrales d’achat qui sortent de leurs gonds et de leurs gondoles pour dénoncer une proposition de loi Egalim 3, que le président de la République avait évoquée à Terres de Jim en septembre dernier. Elle vise à pérenniser le relèvement du seuil de revente à perte et l’encadrement des promotions et à ré-ré-ré-équilibrer (Egalim 3 oblige) les relations, en faisant pencher le balancier du côté de l’amont. Ce qui n’empêche pas le gouvernement de demander, en même temps, la mise en place d’un « panier anti-inflation ». Payé par qui ? En partie par les producteurs de pommes, qui vendent 40% en-deçà de leurs coûts de production, malgré Egalim. En attendant Egalim 7, d’aucuns auront arraché ou pris leur retraite. Mais quelle retraite...