L’Aile ou la cuisse, de la fiction à la viande artificielle mais bien réelle

[Edito] Deux sociétés viennent d’obtenir l’autorisation de commercialiser aux Etats-Unis de la viande de poulet cultivée en laboratoire. Bientôt au menu d’un restaurant triplement étoilé de San Francisco, propriété d’une cheffe... française.

Flash-back. En 1976, le réalisateur Claude Zidi se livre dans « L’Aile ou la cuisse » à une satire de la « malbouffe », un terme qui émerge dans les années 1970 avant d’être popularisé en 1999 par José Bové et son fait d’armes, le démontage du McDonald’s de Millau (Aveyron), sur fond de conflit commercial entre le Roquefort et le bœuf US aux hormones. Dans le film, Louis de Funès, alias Charles Duchemin, patron du guide gastronomique « Duchemin », mène une croisade contre un empereur de la malbouffe s’apprêtant à jeter son dévolu sur des restaurants gastronomiques. Adieu le poulet de Bresse AOC. Bonjour le poulet moulé-injecté-doré au pistolet en usine.

Quatre à six semaines dans des bioréacteurs

Le 21 juin, le Département américain de l’agriculture (USDA) a autorisé les sociétés Upside Foods et Good Meat à commercialiser de la viande de poulet cultivée à partir de cellules animales, ce que Singapour avait initié en 2020. La viande dite « artificielle » ou de « laboratoire » est produite à partir de cellules animales « élevées » dans des bioréacteurs alimentés en différents nutriments (protéines, graisses, sucre, minéraux, vitamines). Le cycle de production oscille entre quatre et six semaines. Le produit final est bien un produit animal et non un produit similé-carné élaboré à partir de produits végétaux. A ceci près qu’il n’y a ni élevage, ni abattage d’animaux.

« J’ai regardé le produit, je l’ai goûté, c’est magnifique »

L’impact environnemental reste encore largement à documenter, tout comme le modèle économique, ce qui, de l’aveu même des opérateurs, demandera encore un peu de temps avant de démocratiser la consommation de la viande artificielle, à supposer que l’acceptabilité soit au rendez-vous. Mais ses promoteurs sont convaincus qu’elle constitue une réponse à la croissance mondiale d’une population toujours plus consommatrice de protéines animales. Quelques restaurants huppés américains seront les premiers à la proposer. Parmi eux, l’Atelier Crenn à San Francisco. « J’ai regardé le produit, je l’ai goûté, c’est magnifique, je pense que ça va bouleverser le monde » a prophétisé Dominique Crenn sur les ondes de RTL au lendemain de l'annonce des autorités américaines. D’origine bretonne, la cheffe est la première femme à avoir décroché une troisième étoile dans le Guide Michelin aux Etats-Unis. On attend - ou pas - le remake.