La plateforme Secure Colza livre ses premiers enseignements

Mise en place par le cabinet Agrosolutions, la coopérative Noriap et RAGT Semences, la plateforme d’essai jauge la marge brute de différentes stratégies d’implantation du colza, élément clé de la réussite d’une culture sous tension, qui va perdre avec le phosmet un insecticide crucial.

Les sécheresses estivales à répétition jouent un mauvais tour au colza. En l’espace de quelques années, l’oléagineux a perdu de sa superbe, avec une sole passée le seuil du million d’ha en 2020-2021. Il faut dire qu’au cours de cette campagne de sinistre mémoire, 140.000 ha ont été retournés au cours de l’hiver faute de potentiel suffisant, les insectes achevant de rétamer colzas chétifs

L’oléagineux est un peu mieux engagé pour la campagne 2021-2022, avec une hausse de 13% de surfaces (1,1 millions ha) à la faveur d’un été 2021 pluvieux et d’une envolée des cours. Mais il reste à -11% en-deçà de la moyenne quinquennale.

Secure Colza à la rescousse

Le colza étant une culture stratégique tant pour les assolements que pour la filière (huile, biodiésel, tourteaux), la filière se mobilise pour tenter de vaincre la fatalité. En 2020, une initiative est venue du cabinet Agrosolutions, de la coopérative Noriap et de RAGT Semences. Sur une plateforme d’essais située dans la Somme, plusieurs stratégies d’implantation ont été étudiées, à savoir la date de travail du sol (deux modalités), la date de semis (4 modalités) et la fertilisation au semis, avec diverses options croisées allant de l’absence de fertilisation à une fertilisation en NP starter localisée en passant par l’utilisation de plantes compagnes. Résultats : certaines modalités d’implantation ont permis d’optimiser la marge brute de plus de 300 €/ha par rapport aux modalités témoins. La fourchette des rendements s’est établie entre 29,1 q/ha et 38,0 q/ha et celle des marges brutes entre 911 €/ha et 1294 €/ha.

Les modalités de la plateforme Secure Colza en 2020-2021 (Source : Agrosolutions)
Les modalités de la plateforme Secure Colza en 2020-2021 (Source : Agrosolutions)

L’incidence des trois paramètres d’implantation

Le travail du sol précoce a permis d’obtenir les meilleur rendements (+3,9 q/ha) comparativement à la modalité décalée d’une semaine.

La date de semis précoce a quant à elle permis d’atteindre le stade 4 feuilles avant l’arrivée des altises adultes. Pour les modalités avec plantes compagnes, la modalité avec ajout d’une fertilisation starter a permis de limiter l’effet de compétition avec le colza. Pour maximiser le développement et la rentabilité des plantes compagnes, le 20 août est ressorti comme date butoir dans le contexte de la plateforme.

L’apport d’une fertilisation starter semble toujours être intéressant pour améliorer sa marge brute (+145 €/ha par rapport au témoin avec un prix du colza à 500 €/t, +98 €/ha avec un prix du colza à 350 €/t). Le gain de rendement observé avec les plantes compagnes n’a pas permis de compenser leur coût à l’échelle du cycle du colza (-5 €/ha par rapport au témoin avec un prix du colza à 500 €/t, -25 €/ha à 350 €/t). Cependant, la modalité mixte fertilisation starter et plantes compagnes semble présenter un compromis intéressant (+128 €/ha par rapport au témoin avec un prix du colza à 500 €/t, +67 €/ha avec un prix du colza à 350 €/t) en permettant une meilleure croissance du colza à l’automne qu’avec uniquement les plantes compagnes, un meilleur gain de rendement et l’effet des plantes.

La fin du phosmet actée

Les trois partenaires du projet Colza Secure ont décidé de reconduire le protocole pour la campagne en cours, en l’enrichissant d’une seconde plateforme, située en Côte d’Or, grâce au ralliement de la coopérative Dijon Céréales. Les deux plateformes vont pouvoir tester l’effet du retrait du phosmet, la Commission européenne ayant décidé de retirer la molécule du marché à compter du 1er août 2022. Un écueil supplémentaire pour le colza, en l’absence d’alternative tangible pour lutter contre les altises. Un délai de grâce pourrait retarder l’échéance au 1er novembre 2022, sous réserve que les autorités françaises le décrètent.