La volaille n’est pas à la fête

[Edito] Une épidémie virale, des morts par milliers, des confinements… face à la crise, la vaccination contre la grippe aviaire semble être, comme pour le Covid-19, la porte de sortie pour sauver la filière - et permettre de maintenir des modèles d’élevages en plein air, ceux-là mêmes qui sont plébiscités par les consommateurs.

Un dispositif au coût conséquent, qui doit être rendu obligatoire mais qui est indispensable pour sortir de la crise : telle est la position de l’interprofession de la volaille de chair en faveur de la vaccination contre l’influenza aviaire. Alors que l’épidémie repart, malgré les mesures strictes de biosecurité mises en place, malgré la mise sous abri des volailles et malgré un plan de dédensification des élevages, la vaccination apparaît désormais comme la seule porte de sortie pour la filière.

Pour l’Etat, on n’est pas loin du « quoi qu’il en coûte » : plus d’un milliard d’euros ont déjà été mobilisés pour les indemnisations liés aux épisodes de grippe aviaire de 2021-2022. Et la filière demande la prise en charge par l’Etat du coût de la vaccination… quand elle sera en place. Car pour le moment, seul un vaccin dispose d’une autorisation de mise sur le marché sur le territoire européen pour les poules, mais sa souche vaccinale n’a pas été actualisée depuis 2006. Ce vaccin est seulement utilisé chez les oiseaux des parcs zoologiques.

En revanche, aucun vaccin n’est pour le moment disponible pour les canards, qui sont les plus sensibles au virus, mais des expérimentations sont en cours. Comme l’a récemment indiqué l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) dans un rapport, les conditions ne sont donc pas réunies pour la mise en place de la vaccination dès cet hiver. Et même quand elles le seront, il faudra que tous les pays européens producteurs de volailles s’alignent sur la même position, afin d’éviter les distorsions de concurrence. 

Stratégie de vaccination

Le ministère de l’Agriculture s’attelle aux négociations pour faire accepter le vaccin, tant au niveau européen qu’auprès des pays qui importent nos volailles. Il mise sur un objectif de début de la vaccination à l’automne 2023. En attendant, la pire crise avicole de l’histoire impacte lourdement les éleveurs, certains décidant purement et simplement de jeter l’éponge, et fragilise toute une filière qui, de la sélection à l’export, représente 100 000 emplois en France. 

Le ministère de l’Agriculture a réaffirmé que le confinement des volailles était la mesure la plus protectrice pour limiter les contacts avec les oiseaux sauvages, au grand dam de la Confédération paysanne et du Modef, qui estiment que l’élevage de plein air, plébiscité par les consommateurs, est sacrifié. L’arrivée de vaccins pourrait être, là encore, un salut pour ces élevages. En cas de doses disponibles en quantité suffisante, l’Anses recommande en effet de vacciner en priorité, en plus des élevages de sélection et de multiplication, les élevages de plein air.