Le PLOA adopté en Commission à l’Assemblée, les GFAI retoqués

Malgré une opposition dénonçant un texte peu ambitieux aux plans du revenu, du foncier ou encore de l’adaptation au changement climatique, le gouvernement a fait adopter samedi en commission son Projet de loi d'orientation agricole. La création des Groupements fonciers agricoles d'investissement (GFAI) a été retoquée. Le texte sera examiné dans l'hémicycle à partir du 14 mai.

A l'issue des quelque 35 heures de débats, le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau a appelé à « faire en sorte que le monde agricole retrouve du sens et comprenne ce qu'on veut de lui ». Les députés du camp présidentiel (Renaissance, MoDem, et Horizons) ont voté pour le texte. Ceux de gauche (LFI, PS et Ecologiste) s'y sont opposés. La droite, le Rassemblement national et les indépendants de Liot se sont abstenus.

Si les débats ont été largement apaisés, l'opposition a longuement déploré un manque d'ambition du projet de loi. « De nombreux sujets sont absents : le revenu, le foncier et l'adaptation au changement climatique », a énuméré David Taupiac (Liot). « La question numéro un, c'est ce qu'il n'y a pas dans ce texte. Le vrai sujet c'est l'accès au foncier », a abondé Dominique Potier (PS). « Ce texte (...) n'apporte rien aux agriculteurs », a également critiqué Marie Pochon (écologiste). « Nous avons besoin de ce texte utile qui va garantir notre souveraineté alimentaire et le renouvellement des générations », a jugé au contraire Eric Martineau (MoDem).

Alors que l'exécutif espère récupérer des voix à droite, le député LR Julien Dive a mis en exergue des « lignes rouges », à l'instar d'un dispositif de diagnostic prévu pour les exploitations agricoles lors d'une installation ou d'une transmission. Son groupe s'inquiète d'éventuelles lourdeurs imposées
aux paysans. Il a soulevé l'hypothèse d'une motion de rejet dans l'hémicycle, à l'instar de celle portée par LR contre le projet de loi immigration. « Nous travaillons avec eux pour trouver des avancées qui correspondent à ce qu'ils souhaitent », a expliqué samedi la ministre des Relations avec le Parlement Marie Lebec, interrogée sur Franceinfo.

« Droit à l'erreur »

Le texte, éclectique, mêle des mesures sur la formation, les transmissions d'exploitation, ou encore l' « accélération des contentieux » en cas de recours contre des projets de stockage d'eau ou de construction de bâtiments d'élevage, en dépit d'alertes du Conseil d'État sur des « risques de constitutionnalité ». « Nous n'avons pas la même lecture du texte », a assumé le ministre. Le gouvernement sollicite également le droit de modifier par ordonnance la répression de certaines atteintes à l'environnement, en requalifiant par exemple des sanctions pénales en sanctions administratives.

Les députés ont approuvé samedi ce volet contesté, en dépit de critiques de la gauche, qui, outre son opposition au fait de légiférer par ordonnances, s'inquiète de voir cette réévaluation de l'échelle des peines se faire au détriment de la protection de l'environnement. Le ministre a annoncé que le périmètre de ces ordonnances serait inscrit « dans le dur » d'ici l'arrivée du texte dans l'hémicycle, pour que les députés puissent voter en connaissance de cause. Les élus ont également fait un pas vers un « droit à l'erreur » des agriculteurs, en approuvant, à l'initiative de LR, le fait que « la bonne foi » d'un exploitant « est présumée » lors d'un contrôle administratif.

Les GFAI retoqués

Le gouvernement a en revanche connu un revers sur un article-clé qui doit instaurer des Groupements fonciers agricoles d'investissement (GFAI). Ces structures doivent lever de l'argent auprès d'investisseurs publics ou privés afin d'acheter des terres et les louer à de nouveaux agriculteurs n'ayant pas forcément les moyens d'acheter. Mais une coalition des composantes de l'opposition a supprimé la mesure, invoquant un risque de « financiarisation » de l'agriculture, voire d'envolée des prix du foncier.

Le camp présidentiel s'en défend et une réécriture pourrait être proposée dans l'hémicycle. Son projet de loi prévoit également de consacrer « l'agriculture, la pêche, l'aquaculture » et le pastoralisme comme étant « d'intérêt général majeur », notamment dans le but de faciliter le parcours administratif des projets de structures de retenues d'eau ou de bâtiments d'élevage hors-sol. L'article sera réécrit en séance mais des élus et des juristes restent circonspects sur sa portée, la protection de l'environnement ayant une valeur constitutionnelle alors que cet intérêt général majeur est inscrit dans une loi simple. Le texte doit désormais être examiné dans l'hémicycle à partir du 14 mai.