Lutter contre l’artificialisation, un vaste chantier

[Edito] La loi Climat inscrit dans le béton l’objectif de diviser par deux le rythme d’artificialisation des sols dans les dix prochaines années. Les collectivités seront incitées à « renaturer » les sols artificialisés et à « densifier » les zones urbaines, deux solides chantiers pour les années à venir.

Adoptée définitivement le 20 juillet, la loi Climat réserve un large volet à la lutte contre l’artificialisation des sols. Laquelle est source de perte de biodiversité, de pollution, de hausse des émissions de gaz à effet de serre ou bien encore d’augmentation du risque d’inondations, ces dernières faisant tristement l’actualité ces derniers jours.

La loi prévoit de diviser par deux le rythme d’artificialisation des sols d’ici dix ans et d’atteindre l’objectif de « zéro artificialisation nette » d’ici 2050. Un horizon que d’aucuns considèrent comme trop lointain : dans une tribune parue le 14 juin dans « Le Monde », la Confédération Paysanne, Terre de liens et trois associations écologistes craignent que « cette division par deux en dix ans de l’artificialisation restera un vœu pieux, faute d’instruments fiables et non contestables et de compétences de l’État en matière d’extension urbaine ».

Contre l’artificialisation, la densification des zones urbaines et la renaturation des sols imperméabilisés apparaissent comme des solutions majeures. Mais elles se heurtent à des freins à la fois techniques et sociétaux. La renaturation des terres déjà, est un processus complexe et coûteux. « Une fois le béton et le bitume supprimés apparaissent des terres compactées ; l’eau et l’air ne peuvent y circuler, la réserve hydrique y est faible, comme le stock de carbone ; ces terres ne pourront retrouver leur niveau antérieur fonctionnel qu’après plusieurs dizaines d’années au mieux », écrivent les organisations dans la tribune du Monde.

Attrait pour la campagne

La densification des zones urbaines, ensuite, ne va certainement pas dans le sens de la préférence qu’expriment les ménages depuis de nombreuses années pour l’habitat individuel, ce dernier accroissant la demande en sols artificialisés tant pour le bâti que pour les jardins attenants. Et la crise sanitaire a exacerbé ce besoin, le marché des maisons à la campagne ayant d'ailleurs atteint un niveau record en 2020.

Enfin, comment concilier fin de l’artificialisation et redynamisation des campagnes ? « D’ores et déjà, les maires de petites communes s’inquiètent de ne plus pouvoir s'étendre quand les promoteurs, confrontés à une diminution spectaculaire des permis de construire, annoncent une nouvelle flambée des prix de l’immobilier qui pénaliserait les ménages les plus modestes », écrit le 20 juillet dans « Les Echos » Franck Gintrand, délégué de l’Institut des territoires et consultant en stratégie.

Redynamiser les campagnes sans empiéter ni sur l’artificialisation des sols, ni sur le prix du foncier : une gageure pour les années à venir et un véritable challenge pour les territoires ruraux.