Pour le foie gras, il va falloir faire maigre

L’influenza aviaire va peser sur la disponibilité de foie gras tandis que l’envolée des coûts de production va renchérir son prix. Le retour à la normale est escompté pour fin 2023, sous réserve que le Plan Adour soit efficace et que les reproducteurs soient épargnés.

« Grâce à leur mobilisation sur le terrain, il y aura bien du foie gras à partager à Noël mais pour être sûrs de profiter du foie gras en fin d’année, les professionnels conseillent aux consommateurs de ne pas attendre le dernier moment pour faire leurs achats ». Tel est le conseil donné par le Cifog, l’interprofession du foie gras, à moins de deux mois des fêtes de fin d’année. Celles-ci concentrent 80% de la consommation annuelle de foie gras.

La succession des épizooties a engendré sur la période 1016-2020 un recul de 25% de la production de foie gras comparativement à la moyenne quinquennale 2011-2015 (Source : Cifog)
La succession des épizooties a engendré sur la période 1016-2020 un recul de 25% de la production de foie gras comparativement à la moyenne quinquennale 2011-2015 (Source : Cifog)

+0,50 € pour une tranche de 40 grammes

Le Cifog fait état pour l’année en cours d’une chute de la production de foie gras comprise entre -30% et -35%, sur fond de stocks « largement entamés » par les crises sanitaires successives. La dernière (2021/2022) fut la plus impactante des quatre épisodes d’Influenza aviaire hautement pathogène (IAHP) vécus ces six dernières années, avec 1378 foyers recensés (contre moins de 500 en 2020/2021) et 19,3 millions de volailles abattues (contre 3,5 millions en 2020/2021), dont 3,8 millions de canards dans la filière foie gras. Il faut ajouter les 6 millions de canards qui n’ont pas été mis en place.

En 2021, la production française de foie gras s’est établie à 11.972 tonnes, contre 14.593 tonnes en 2020. La succession des épizooties a engendré sur la période 1016-2020 un recul de 25% de la production comparativement à la moyenne quinquennale 2011-2015.

Le coût de production moyen d’un canard IGP élevé et engraissé a bondi de 15,7% sur les neuf premiers mois de l’année, comparativement à 2021, et de 30,6% comparativement à 2020 (Source : Cifog)
Le coût de production moyen d’un canard IGP élevé et engraissé a bondi de 15,7% sur les neuf premiers mois de l’année, comparativement à 2021, et de 30,6% comparativement à 2020 (Source : Cifog)

Outre la raréfaction de l’offre, l’augmentation des coûts de production est l’autre marqueur de la filière. Selon le Cifog, le coût de production moyen d’un canard IGP élevé et engraissé a bondi de 15,7% sur les neuf premiers mois de l’année, comparativement à 2021, et de 30,6% comparativement à 2020. « Il faudra compter en moyenne 0,50 centimes d’euros supplémentaires pour une part de 40 grammes de foie gras », indique le Cifog.

Les mises en place réduites de près d’un tiers

L’an passé, et pour la première fois, le virus a jeté aussi son dévolu sur les Pays de la Loire, dont les élevages de canards reproducteurs assurent 70% des canetons de la filière. « Près de 90% des reproducteurs de ce bassin ont été décimés et ce capital mettra de longs mois avant de se reconstituer, indique le Cifog. Le rôle des élevages dans cette région est donc déterminant pour le repeuplement du Sud-Ouest ».

Evolution des abattages contrôlés de canards gras (Source Cifog)
Evolution des abattages contrôlés de canards gras (Source Cifog)

Conséquence, les mises en place de canetons mâles, traditionnellement utilisés dans les élevages de la filière foie gras, ont diminué de 46 % sur 8 mois en 2022, comparativement à 2021. Le recours aux femelles a toutefois permis de limiter la diminution des mises en place à -29 % sur la période.

L’espoir du Plan Adour

Si les approvisionnements pour les fêtes de fin d’année sont peu ou prou assurés, s’agissant tout du mois de la filière longue, la menace que fait planer l’IAHP est encore montée d’un cran cette année, avec un virus qui n’a pas pris de vacances cet été, affectant ici ou là la faune sauvage et même quelques élevages localisés dans le Nord et dans la Somme. Le caractère endémique de l’IAHP, ajouté à sa capacité de nuisance sur toutes les zones d’élevage, laisse augurer un hiver de tous les dangers. Signe annonciateur s’il en est, le ministère de l’Agriculture a relevé le niveau de risque de « négligeable » à modéré » le 2 octobre dernier. Le 18 octobre, la mise à l’abri des animaux a été décrétée en Bretagne, dans les Pays de la Loire ainsi que dans les Deux-Sèvres, assortie d’autre mesures de prévention et de surveillance.

Dans le Sud-Ouest, la filière foie gras (et autres volailles) a pris les devants avec l’adoption du « Plan Adour ». Fruit d’un accord interprofessionnel conclu le 29 septembre dernier, les élevages de palmipèdes les plus denses situés dans 68 communes du Sud-Ouest connaîtront notamment un vide sanitaire synchronisé du 15 décembre 2022 au 15 janvier 2023 pour éviter tout risque de propagation du virus. Dans le même temps, les autres régions productrices procéderont à des allongements de vides sanitaires. Les fermes de ponte hébergeant les reproducteurs seront protégés par un vide des élevages de canards à foie gras situés à proximité.

Fort de ces adaptations, le Cifog n'espère  un retour à la normale que dans le courant du deuxième semestre 2023.