Rize : « Simplifier la mise en œuvre de la décarbonation »

L’opérateur de compensation carbone entend démocratiser l’accès aux crédits carbone en grandes cultures. La start-up revendique la première notification au Label bas carbone du secteur, tout en restant humble quant à la montée en charge de la décarbonation.

Créée en septembre 2020 par deux ingénieurs polytechniciens, la start-up Rize a notifié son premier projet Label bas carbone (LBC) en septembre 2021 auprès du ministère de la Transition écologique, soit quelques semaines seulement après la reconnaissance officielle de la méthode « grandes cultures ». Celle-ci a été mise au point par les instituts techniques (Arvalis, ITB, Terres Inovia) en collaboration avec Agrosolutions. Elle complète les méthodes labellisées en élevage (Carbon Agri), pour les nouveaux vergers et pour les haies, en attendant la viticulture.

Cette célérité permet à Rize de se revendiquer comme le premier opérateur à s’engager officiellement dans la décarbonation dans le secteur des grandes cultures. « Une centaine d’agriculteurs se sont engagés avec Rize, soit par l’intermédiaire de leur coopérative ou de leur négoce, soit en direct », explique Etienne Variot, co-fondateur de la jeune pousse.

Un opérateur intégré

C’est là une des singularités de Rize, à savoir la possibilité, pour les agriculteurs, de prendre le train de la décarbonation de leur exploitation, de leur propre chef et en lien direct avec un opérateur, en l’occurrence Rize. « La première opération consiste à réaliser une estimation de son potentiel d’évitement d’émissions et de séquestration de carbone sur notre plateforme, explique Etienne Variot. Passée cette étape, nous activons le dispositif d’accompagnement, depuis le diagnostic initial jusqu’à l’audit final en passant l’élaboration du plan d’actions et bien entendu la certification des crédits carbone et leur valorisation sur le marché de la compensation volontaire ».

Etienne Variot, co-fondateur de Rize : « Une centaine d’agriculteurs se sont engagés avec Rize, soit par l’intermédiaire de leur coopérative ou de leur négoce, soit en direct » (Crédit photo : Rize)
Etienne Variot, co-fondateur de Rize : « Une centaine d’agriculteurs se sont engagés avec Rize, soit par l’intermédiaire de leur coopérative ou de leur négoce, soit en direct » (Crédit photo : Rize)

Cette démarche n’est cependant qu’une option car Rize est aussi en relation avec des acteurs de terrain, des coopératives et négoces, des Chambres d’agriculture ou encore des associations d’agriculteurs avec lesquelles la jeune entreprise est susceptible d’accomplir les mêmes missions. Plusieurs coopératives (dont Agora) et des négoces (dont Agri Alternative et Agro-distribution Services) ont d’ores-et-déjà contractualisé avec Rize. La portée en termes de réduction d’émissions est suspendue aux diagnostics en cours de réalisation.

Un marché carbone encore timide

L’arrivée du label bas carbone en grandes cultures coïncide avec les premières évaluations technico-économiques de la démarche. En Champagne par exemple, sur un échantillon de dix exploitations, Terrasolis a mis en évidence, au plan strictement comptable, un bilan négatif sous le triple effet de la faiblesse du potentiel de réduction d’émissions (entre 0,5 t et 1,5 t équivalent CO2 par hectare), du prix de la tonne de CO2 et du coût de la transition.

Selon une étude de l’INRAE, qui a analysé les différentes pratiques stockantes de carbone en grandes cultures (cultures intermédiaires, agroforesterie intraparcellaire, insertion et de l’allongement des prairies intermédiaires, semis direct, haies...), le stockage additionnel de carbone dans le sol génère dans tous les cas un coût additionnel pour l’agriculteur. « Les crédits carbones se sont pas un eldorado, confirme Etienne Variot. Mais c’est un mécanisme de financement de la transition, avec des leviers plus ou moins chers, plus ou moins rentables mais avec également des bénéfices agronomiques et écologiques pas forcément comptabilisés. Les crédits carbone ne sont qu’un élément de l’équation économique. Il faut également prendre en compte les autres financements à venir, tels que ceux provenant des filières et de la Pac, ainsi que la rentabilité interne à moyen terme à travers des performances agronomiques supérieures par une meilleure santé des sols ».

"Les acheteurs manifestent un vrai intérêt pour les projets agricoles, qui sont reconnus pour leur qualité"

Mais l’opérateur mise aussi sur un décollage des volumes et des prix d’achats des crédits carbone générés par l’agriculture. « La politique d’une entreprise repose sur le triptyque « mesurer, réduire, compenser », déclare Etienne Variot. On assiste à une maturité croissante sur les deux premiers volets et à un début d’engagement sur le troisième. Aux Etats-Unis mais aussi en Europe, de gros acteurs commencent à s’engager dans la compensation, en lien avec leurs objectifs de neutralité carbone. On est à la veille d’une croissance des volumes et des prix et les acheteurs manifestent un vrai intérêt pour les projets agricoles, qui sont reconnus pour leur qualité ».