« Y’a plus de saisons » … il y a 200 ans déjà

[Edito] En 1821, après plusieurs années de fortes gelées et d'inondations, le gouvernement pose pour la première fois la question d’un lien entre les variations du climat et la déforestation importante de l’époque.

Dans des documents d’archives mis en ligne sur son site, Météo-France révèle que les variations du climat et leurs impacts sur les cultures faisaient déjà partie des préoccupations du gouvernement il y a 200 ans. Ainsi en 1821, après plusieurs années de fortes gelées et d'inondations, le ministre de l’Intérieur de Louis XVIII interroge pour la première fois le lien possible entre la déforestation importante et ces variations du climat. A l’époque, la forêt française a atteint sa plus faible superficie avec 1 300 000 ha.

Une circulaire est adressée à l’ensemble des préfets, qui doivent procéder au recensement détaillé des forêts françaises et rendre compte des modifications météorologiques depuis les 30 dernières années. Les réponses préfectorales conservées dans le fonds d’archives de Météo-France montrent que les destinataires de cette circulaire se sont en majorité retrouvés désemparés par la demande. Certains préfets ont pris leur mission à cœur en fournissant des réponses sur plusieurs pages, relate Météo-France. D’autres ont tout simplement ignoré la demande du ministère, à l’instar du sous-préfet d’Embrun qui répondra à l’une des notes de rappel ainsi : « Il faut cesser ces folles demandes... ».

L'exceptionnel... tous les ans

Deux siècles plus tard, la France possède plus de 10 millions d’hectares de forêt supplémentaires et une température moyenne en hausse de 2°C. Les causes du dérèglement climatique sont désormais connues mais, malgré les progrès techniques, les parades disponibles pour lutter contre les aléas climatiques demeurent insuffisantes.

Au sortir d’un épisode de gel 2021 exceptionnel de par son ampleur géographique et son intensité, les toutes premières estimations des pertes de production commencent à tomber : -60% pour les abricots, -40% pour les pêches, -30% pour la viticulture, -10% pour les betteraves… Les conséquences de cet épisode de gel s’annoncent déjà supérieures à celles des années 1991 et 2017. Selon les météorologistes, un changement aussi soudain de température comme celui qui a été observé entre fin mars - records de chaleur battus - et début avril - records de froid significatifs - est inédit depuis 1947.

Face au choc, les demandes des filières affluent : année blanche, décalage des prêts garantis par l’Etat (PGE), annulation des charges, mesures de chômage partiel, etc., mais aussi un soutien psychologique pour les producteurs affectés. « A catastrophe exceptionnelle, mesures exceptionnelles », a promis le Premier ministre Jean Castex, indiquant qu’un dispositif de solidarité nationale sera proposé dans les prochains jours. Plusieurs régions ont déjà annoncé le déblocage d’aides pour les exploitations touchées.

Le ministre de l’Agriculture Julien Denormandie souhaite de son côté « aller plus loin » : « Au-delà de ces mesures d’urgence, il faut repenser le dispositif d’assurance et aller vers une cotisation fondée sur une solidarité nationale, et pas que sur le monde paysan », a-t-il déclaré à l’Assemblée nationale le 13 avril. Au vu de l’indignation provoquée par les conditions d’indemnisation des éleveurs suite à la sécheresse de l’an passé, il y a urgence à réformer. D’autant que les années « exceptionnelles » se suivent et se ressemblent.