300 élevages bientôt labellisés bas carbone

La somme des engagements permettra d’éviter l’émission de 137 000 tonnes équivalent carbone d’ici à 5 ans. Chaque éleveur percevra 30 euros par tonne, sous réserve d’atteindre son objectif individuel. Récemment bouclé, le deuxième appel à projet a attiré 1300 agriculteurs.

L’obtention du Label bas carbone (LBC) n’est pas une sinécure. Le processus commence par un diagnostic sur l’exploitation candidate à l’amélioration du son bilan carbone, passant au crible l’ensemble des postes (aliment, engrais, effluents, produits phytosanitaires, énergie) mais aussi toute une série de critères environnementaux (qualité de l’eau et de l’air, préservation de la biodiversité, stockage de carbone), économiques (coûts de production, EBE...) et sociétaux (performance nourricière, vivabilité...).

Le diagnostic débouche sur un plan d’actions, décrivant par le menu tous les leviers à activer au regard de référentiels propres à l’orientation technico-économique de l’exploitation candidate (bovins lait, bovins viande...). Les plans d’actions sont ensuite centralisés par un porteur de projet (Chambre d’agriculture, coopérative, organisme de conseil...) puis soumis au ministère de la Transition écologique qui, au regard des éléments transmis, décerne la labellisation officielle LBC. 

C’est cette ultime étape que s’apprête à franchir France Carbon Agri, qui chapeaute les 20 porteurs de projets engagés dans le premier appel à projet, lancé en novembre 2019. « Le processus est long mais sa robustesse permet de ne pas galvauder les projets de décarbonation en agriculture, positive Jean-Baptiste Dollé, chef du service environnement à l’Institut de l’élevage. Il donne ainsi des gages aux acheteurs de crédits ».

12 000 euros par ferme

Ce temps long, c’est aussi ce qui permet à France Carbon Agri de faire son marché auprès des acheteurs potentiels de crédits carbone (entreprises, collectivités), désireuses de compenser, sur une base volontaire, les émissions résiduelles incompressibles liées à leurs activités. France Carbon Agri, c’est l’association créée par la FNPL, la FNB, la FNO et la FNEC et à laquelle le ministère de la Transition écologique a décerné en octobre 2019 le label LBC pour la méthode de diagnostic Cap2Er, une première en agriculture.

Si le premier appel à projet est labellisé LBC, 25% des 137 000 tonnes équivalent C02 qu’il s’est engagé à éviter ont trouvé preneur auprès de différents acheteurs (Caisse des dépôts, Kering, Tanneries Haas, GSF Propreté, Bordeaux Métropole), au prix unitaire de 30 euros la tonne. Il reste un peu plus de quatre ans pour commercialiser les 75% restantes. « Nous opérons en direct avec les entreprises et collectivités ou par le biais d’apporteurs d’affaires spécialisés tels que Carbon Connect ou Stock CO2, poursuit Jean-Baptiste Dollé. Nous allons prochainement signer de nouveaux contrats de vente et toujours sur cette base de 30 euros la tonne, le prix d’un carbone de haute qualité, tracé, certifié par le Bureau Veritas et assorti de nombreux co-bénéfices environnementaux ».

A 30 euros la tonne et une moyenne d’un peu plus de 400 tonnes par exploitation, c’est un petit pécule moyen de 12 000 euros qui attend les candidats à la décarbonation d’ici à cinq ans. Ceux-ci percevront 40% de leur dû à mi-parcours, sous réserve que les indicateurs soient en phase avec la trajectoire inscrite dans le plan d’action, le solde étant versé au terme du contrat après vérification des objectifs.

Le travail d’ingénierie opéré par France Carbon Agri et les porteurs de projets est quant à lui rémunéré respectivement à 3 euros et 5 euros la tonne de carbone.

Razzia sur le 2ème appel à projet

En novembre dernier, France Carbon Agri a lancé un deuxième appel à projet sur lequel se sont rués 1300 agriculteurs, emmenés par 56 porteurs de projet. Le projet vient d’être notifié au ministère de le Transition écologique, préalable à la réalisation des diagnostics et des plans d’action.

Grâce au Plan de relance, l’Institut de l’élevage va former au premier semestre 250 conseillers à la méthode Cap2Er, portant à 1250 le nombre de conseillers compétents à l’échelle du territoire. Le deuxième appel à projet est potentiellement porteur d’un évitement de 400 000 tonnes de CO2. Si les éleveurs bovins restent largement dominants, le deuxième appel à projet a aussi séduit des céréaliers, la méthode Cap2Er étant chevillée à la méthode grandes cultures, dont la reconnaissance LBC est imminente.

L’Institut de l’élevage n’oublie pas les petits ruminants. Il est à la manœuvre dans le projet européen Life Green Sheep, qui vise à explorer les leviers de réduction d’émissions des élevages ovins (lait et viande) par l’entremise de fermes de démonstration (885 fermes en France) et de fermes innovantes (211), à l’image de ce qu’avait fait l’Idele en bovins avec les programmes Life Carbon Dairy et Life Carbon Beef, et qui ont débouché sur la méthode Cap2Er. Une méthode LBC pour petits ruminants est attendue pour la fin de l’année.

 

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