Gestion des risques climatiques : ça urge plus que jamais

[Edito] Le nouveau dispositif de gestion des risques climatiques, qui se veut universel et accessible au plus grand nombre, est désormais opérationnel. Il ne reste que quelques semaines, sinon quelques mois, pour sécuriser ses récoltes 2023. Il va falloir maintenant s’atteler, tout aussi urgemment, à un autre chantier : celui de l’adaptation des systèmes agricoles au climat.

La refondation des outils de gestion des risques, dont l’origine remonte à 1964 avec la création du régime des calamités agricoles, a été lancée à l’été 2019 en pleine sécheresse. Elle s’est accélérée au printemps 2021 avec l’épisode de gel massif qualifié par Julien Denormandie, alors ministre de l’Agriculture, de « plus grande catastrophe agronomique de ce début de XXIème siècle ». Elle se conclut cet automne, qui porte encore les crevasses et paillasses d’un hiver, d’un printemps et d’un été marqués par des déficits hydriques aussi sévères que dommageables, notamment en production fourragère. Une nouvelle fois, on a appelé au secours les calamités agricoles, que les pouvoirs publics se sont efforcés de suractiver, comme un ultime chant du cygne. Car c’est la dernière fois.

Universalité et accessibilité : les deux mamelles du nouveau système

A compter du 1er janvier 2023, c’est le Fonds de solidarité nationale (FSN) qui prendra le relais. Un simple changement de façade ? Pas vraiment. Un nouveau paradigme. Contrairement aux calamités agricoles, qui n’indemnisaient que les éleveurs et les arboriculteurs, le FSN est ouvert à tous les agriculteurs en cas d’aléas majeurs, avec un seuil de déclenchement dès 30% de pertes pour les prairies et les fruits, 50% pour les grandes cultures, la vigne et les légumes. Au plan financier, le FSN est très logiquement mieux doté par l’Etat que ne l’étaient les calamités agricoles. Mais les taux d’indemnisation seront différents selon que vous aurez souscrit ,ou pas, une assurance récolte : 90% si vous êtes assurés, 45% si vous ne l’êtes pas, taux qui passera à 40% en 2024 et 35% en 2025.

Outre l’universalité, l’accessibilité est l’autre mamelle du nouveau système. L’assurance récolte sera en effet moins chère qu’actuellement. Un : parce que les assureurs ne couvriront plus les risques exceptionnels. Deux : parce que l’assurance sera davantage subventionnée : 70% contre 65% aujourd’hui. En prime, elle déclenchera dès 20% de perte. Autant d’incitations à la souscription et au final, à la perception pleine et entière du FSN, en cas d’aléa exceptionnel.

L’adaptation au changement climatique, le prochain chantier

Cette articulation et ces paramètres correspondent point par point aux exigences de la FNSEA et des JA, à un critère près : celui de la moyenne olympique, à la main de l'OMC et donc ni de la France, ni de l’UE. « L’année climatique que l’on vient de vivre démontre que sans assurance, beaucoup d’agriculteurs ne passeront le cap, a affirmé au Sommet de l’élevage Christiane Lambert, la présidente de la FNSEA. C’est notre rôle, responsables syndicaux, tant aux JA qu’aux FDSEA, de porter la réforme et son déploiement ».

C’est bien le moins. Mais le temps est compté. Il ne reste en effet que quelques semaines, pour les cultures d’hiver, et quelques mois pour les cultures de printemps, les prairies et les cultures pérennes, pour sécuriser les récoltes 2023.

Reste à espérer que le nouveau dispositif sera super résilient. Mais il ne faudrait pas non plus se leurrer : ce n’est pas un salmigondis de taux et de seuils qui va sauver l’agriculture et les agriculteurs du péril climatique, et in fine, garantir notre souveraineté alimentaire. Le système parfait de gestion des risques, à supposer qu’il existe, craquera immanquablement si l’on n’adapte pas nos systèmes de production à la nouvelle donne climatique. C’est le prochain chantier. Il est incommensurable, à peine initié et encore moins budgété. Et là aussi, le temps presse.