Irrigation : l'Etat enquête sur la légalité d'une partie des travaux d'une bassine

La préfecture des Deux-Sèvres a annoncé le 30 novembre le lancement d'une "mission de contrôle et d'expertise" pour vérifier la légalité d'une partie des travaux de construction d'une réserve d'irrigation à Mauzé-sur-le-Mignon, un chantier qui alimente de vives tensions entre écologistes et agriculteurs.

"Au vu des informations portées à (sa) connaissance ces dernières heures", la préfecture entend "vérifier la nature de certaines parcelles traversées par les canalisations de la retenue en construction à Mauzé-sur-le-Mignon", selon le communiqué du préfet Emmanuel Aubry. Les services de l'Etat vont lancer "sans délai une mission de contrôle et d'expertise sur site en lien avec un expert écologue", dont les conclusions sont attendues dans quelques jours. "Si (...) les instigations révélaient des travaux en milieu humide, donc irréguliers en cette période de l'année, toutes les voies de droit seraient mobilisées ipso facto", de la "mise en demeure de remise en état" à un signalement au procureur de la République, a assuré le représentant de l'Etat en Deux-Sèvres.

Mardi 30 novembre, sous l'oeil de la presse et d'un important dispositif de 70 gendarmes appuyés par un hélicoptère, une trentaine de militants du collectif Bassines Non Merci ont arpenté la campagne pour constater l'avancement rapide de la réalisation de tranchées et de pose de canalisations de vidange dans la vallée du Mignon, des travaux pourtant "interdits" selon eux. Il s'appuient sur un arrêté, consulté par l'AFP qui stipule qu'"aucune intervention n'est possible entre le 1er novembre et le 31 juillet (....) en cas de croisement avec un habitat humide ou un cours d'eau".

"Parce que nous avons fait ce constat, l'Etat enfin a rempli son rôle", a réagi Julien Le Guet, porte-parole du collectif d'opposants Bassines Non Merci, "plus déterminé que jamais" à faire stopper le projet, géré de manière "absurde" par l'Etat.

Thierry Boudaud, président de la Coop de l'Eau, coopérative d'agriculteurs qui porte le projet, s'est dit quant à lui "serein", assurant que l'arrêté a été "respecté".

L'opposition aux bassines s'est ces dernières années cristallisée dans les Deux-Sèvres, notamment à Mauzé-sur-le-Mignon où est creusée la première des seize retenues prévues sur le bassin de la Sèvre niortaise, crucial pour l'alimentation du marais poitevin. Ces dernières semaines, la tension est montée d'un cran, comme le 6 novembre, en marge d'une manifestation d'opposants, lorsque des militants avaient saccagé une retenue d'eau en Charente-Maritime, qualifiée de "bassine de la honte", en raison d'irrégularités. Ces dégradations ont été unanimement condamnés par les ministres de l'Intérieur Gérald Darmanin et de l'Agriculture Julien Denormandie et par la FNSEA et la Coordination rurale.

Ces réserves - sorte de cratères recouverts d'une membrane plastifiée - doivent être alimentées par les cours d'eau et nappes phréatiques en hiver, et servir l'été à des agriculteurs irrigants quand la ressource manque, ce qui fait dire à leurs détracteurs qu'elles constituent une "privatisation de l'eau".