Solnovo, un démonstrateur géant et participatif pour dérisquer les transitions

Mis en œuvre par Agri Sud-Ouest Innovation, le projet va embarquer sur un cumul de 15 000 hectares plus de 160 agriculteurs engageant leur exploitation dans l’agriculture régénératrice des sols, en faisant porter, pour partie, le coût des risques sur des financements privés.

En matière de transition, il existait les dispositifs de recherche fondamentale tel que le verger zéro pesticide de l’INRAE dans la Drôme, les plateformes inter-instituts Syppre (Arvalis, l’ITB et Terres Inovia) expérimentant dans la durée des systèmes culturaux disruptifs dans cinq régions distinctes, les collectifs agroécologiques GIEE, les réseau Dephy Ecophyto (200 sites expérimentaux, 3000 exploitations), sans oublier bien évidemment les pratiques individuelles, dont certaines encouragées par diverses aides ciblées de la Pac telles que l’écorégime, les Mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC) ou encore les mesures de soutien à l’agriculture biologique. Point commun à l’ensemble de ces dispositifs : la mobilisation exclusive de moyens financiers publics, nationaux et/ou européens selon les cas. « Dans le cas du projet Solnovo, l’objectif est de faire financer pour partie les transitions agricoles par des financements privés pour les services rendus par l’agriculture à la société entière », déclare Laurent Augier, directeur général du pôle de compétitivité Agri Sud-Ouest Innovation.

"Le sol est notre futur alimentaire, c’est aussi probablement notre futur climatique"

Le projet germait depuis deux ans au sein d’Agri Sud-Ouest Innovation qui fédère, au sein des Régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie, plus de 430 organismes privés et publics agissant dans les filières de l’agriculture, de l’agroalimentaire et des agro-ressources. Objectif de Solnovo : accélérer l’adoption de pratiques résilientes en déverrouillant les freins techniques et financiers. « Sans oublier la charge mentale pesant sur les agriculteurs », ajoute Laurent Augier.

Les pratiques résilientes en question seront celles de l’agriculture régénératrice des sols (ARS) qui, en plus des trois piliers de l’agriculture de conservation des sols (suppression sinon réduction du travail du sol, couverture permanente du sol, diversification et l’allongement des rotations) intègrent la restauration de la santé du sol et sa « recarbonation », la protection intégrée, l’agroforesterie et la reconnexion entre cultures et élevage. « Le sol est notre futur alimentaire, c’est aussi probablement notre futur climatique », souligne Laurent Augier.

Soutien technique et financier durant 5 ans

Au plan technique, durant 5 ans, les 160 agriculteurs représentatifs de quatre filières (grandes cultures, élevage, arboriculture, viticulture) et portés par 9 structures (coopératives, Chambre, interprofession, associations...) vont bénéficier d’un encadrement technico-économique personnalisé, balayant les champs environnementaux (impact des pratiques sur le carbone, l’eau et la biodiversité), techniques (formation, évènements, accès à des base de données porteuses de solutions) et économiques (diagnostic comptable et financier).

"Construire un barrage, cela prend des années. Couvrir un sol, on peut le faire du jour au lendemain"

Coût de l’opération : 70 euros par hectare et par an, d’où l’appel au financement participatif sur Miimosa, à hauteur de 5 millions d’euros. Tout sauf une paille. « Si le citoyen demande à avoir dans son assiette une alimentation locale, la prise de conscience doit être immédiate et les changements ultra-rapides, argumente Laurent Augier. Dans les cinq ans à venir, le changement climatique risque d’être encore plus visible et la problématique de l’eau encore plus sévère. Construire un barrage, cela prend des années. Couvrir un sol, on peut le faire du jour au lendemain ».

Bénéficiant de l’appui financier des régions Occitanie et Nouvelle-Aquitaine, ainsi que l’Agence de l’eau Adour-Garonne. Solnovo espère aussi se financer via la vente de crédits carbone.

Les 9 projets Solnovo

- Carbo d’Oc (coopérative Agr d’Oc – 20 agriculteurs) est un projet pilote de transition agroécologique vers une Agriculture de régénération des sols (ARS), moins consommatrice d’intrants et stockant davantage de carbone

- Conser’Sol (Chambre d’agriculture de l’Arière, 12 agriculteurs, 1212 ha) combine plusieurs leviers de l’Agriculture Régénératrice des Sols (ARS) : renforcement de la couverture des sols, réduction du travail du sol en sécurisant l’implantation des cultures, amendements organiques, partenariats éleveurs (dont apiculteurs) et céréaliers, agroforesterie

- Madisol (GIEE Agro Réseau 64 et de la Cave de Crouseilles, 13 viticulteurs, 221 ha) vise à travailler l’insertion de couverts végétaux en inter-rangs mais aussi la présence de haies et d’arbres sur les parcelles dans un territoire à fort risque érosif et de battance

- Poly-Herbagers (Association Herbager Pâturant Sud-Ouest, 25 éleveurs, 2000 ha) vise à faciliter, étendre ou consolider les pratiques de pâturage tournant dynamique et à construire un écosystème prairial plus adapté, résilient et favorable à l’alimentation du cheptel au pâturage

- Prun’Na Grow (Bureau national interprofessionnel du pruneau, 11 arboriculteurs, 320 ha) vise a réduire l’empreinte environnementale de la prune d’Ente par de nouvelles pratiques agroécologiques, combinant résilience climatique, reconnaissance sociétale et valorisation économique

-Sol’Seli (Fermes de Figeac, 22 agriculteurs, 3000 ha) a pour objectif d’atteindre une couverture intégrale des sols, via le semis direct sous couvert, l’allongement de la durée de vie des prairies, l’implantation de méteils et de couverts multi espèces ou encire de haies

- Solnov’eau en Ségala (Sol & eau en ségala, 13 éleveurs, 520 ha) vise à améliorer l’autonomie alimentaire des troupeaux, améliorer les rotations et optimiser les couverts végétaux, minimiser l’utilisation d’engrais de synthèse ou encore tester de nouvelles techniques telles que l’enrobage des semences par des biostimulants ou l’utilisation de thés de compost oxygénés

- TopSol (Union des coopératives Entente, 24 agriculteurs, 3000 ha) entend paser d’un système vulnérable (chimie « lourde » avec travail du sol +/- intensif) à un système résilient (chimie « minimale » et/ou « alternative » (bioproduits, etc.) sans aucun travail du sol » où les mix performants de plantes de « renfort » (couverts végétaux) sont à la base du système de production

- Vivasol (Coopératives de Mansle et de La Tricherie, 21 agriculteurs, 4400 ha) veut explorer l’intégration et l’augmentation de l’implantation de couverts végétaux, l’implantation de plante(s) compagne(s) lors de la mise en culture de colza, la réduction du travail du sol ou encore l’introduction de l’élevage dans un système céréalier