Notre assiette, notre santé, notre climat

[Edito] Le 1er juillet prochain sera instaurée la Stratégie nationale de l’alimentation, de la nutrition et du climat (SNANC), ce qui n’est pas sans générer quelques crampes d’estomac au sein de la profession, friande de conservatisme. Notre salut repose pourtant en partie sur cet accord mets-santé-climat.

Ce qui, dans notre assiette, est bon pour notre santé l’est également pour notre environnement : c’est ce qu’affirmait en 2020 l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), sur la base d’une étude démontrant que la bonne application des recommandations nutritionnelles réduisait de 50% l’impact sur l’environnement, au prisme de trois critères (émissions de gaz à effet de serre, ressources utilisées, occupation des sols). Les chercheurs étaient arrivés à cette conclusion en comparant les recommandations du Programme national nutrition santé (PNNS) de 2017 avec celles de 2001. Ces dernières visaient, entre autres, à augmenter la consommation de fruits et légumes et à favoriser la consommation de produits laitiers pour le calcium. Celles de 2017, en accord avec la littérature scientifique actualisée, soulignaient la nécessité d’intégrer la dimension environnementale de l’alimentation. Le PNSS recommandait (et recommande toujours), de diminuer sa consommation de viande rouge et de charcuterie, de produits sucrés, un apport suffisant mais limité de produits laitiers, une limitation des apports d’alcool et d’augmenter sa consommation d’aliments d’origine végétale (fruits et légumes, légumineuses, produits céréaliers complets) et de favoriser les aliments issus de l’agriculture biologique. En termes d’impact sur la santé, l’application des recommandations nutritionnelles de 2017 s’avérait également plus performante que celles de 2001, en prévenant 10% supplémentaires de morts prématurées, principalement liées à des maladies cardiovasculaires.

Un impact notable, des marges de manœuvre

Nos choix alimentaires ne sont pas climatiquement anodins. Selon le Commissariat général au développement durable, l’alimentation représente 22% de l’empreinte carbone (contre 30% pour le transport et 23% pour le logement). L’empreinte se décompose en 54% de produits intérieurs et 46% de produits importés, en 51% de produits transformés, 26% de produits non transformés, 14% de restauration hors foyer et 9% de cuisson et gestion des déchets. Pas climatiquement anodins, nos choix alimentaires ne sont pas non plus nutritionnellement corrects. Selon Santé publique France, 40% des hommes et 25% des femmes outrepassent la recommandation du PNNS s’agissant de la consommation de viande (500g/semaine). Le ratio est de 70% et de 50% pour la charcuterie (150g/semaine). 60% des adultes n’incluent pas de produits céréaliers complets et peu raffinés dans leur alimentation. 85% ne satisfont pas la recommandation concernant les légumes secs et autant ne déclarent aucune consommation de fruits à coque non salés quand le PNNS recommande d’en consommer une petite poignée tous les jours.

2023, année de bascule ?

Des marges de progrès sont donc à portée de fourchette. C’est plutôt heureux à l’heure où le changement climatique ne jeûne pas. Encore faut-il que nos comportements évoluent, ce sur quoi les politiques publiques se font désespérément les dents. L’Etat ne lâche pas le morceau et s’apprête à remettre le couvert. Le 1er juillet prochain sera instaurée la Stratégie nationale de l’alimentation, de la nutrition et du climat (SNANC), ce qui n’est pas sans générer quelques crampes d’estomac au sein de la profession, friande de conservatisme. D’ici à la fin de l’année, l’affichage environnemental devrait par ailleurs s’inviter sur les produits alimentaires, tandis que le Nutri-score verra son algorithme s’affiner. Quant aux vins, ils vont perdre leur régime d’exception qui les dispensait d’afficher la liste de leurs ingrédients ainsi que leur valeur nutritionnelle, obligation incombant à tous les produits alimentaires depuis 1979 en Europe. Plus que jamais, à voir et à manger.