Lait : quelles perspectives de marché en 2020 ?

Du côté de la production

Avec la sécheresse et les moindres stocks fourragers dans plusieurs zones de production européennes et françaises, la production pourrait connaître un repli jusqu'au printemps 2020. Le cheptel laitier tend à régresser dans diverses régions européennes.

En France, la courbe démographique est à l'œuvre avec, par exemple, une réduction des points de collecte graduelle :

• - 4,4 % en France en 2019-2018 (- 4,72 % dans le bassin des Pays de la Loire et Bretagne).

La hausse des volumes par point de collecte actif pourrait s'essouffler quand on sait que 50 % des producteurs de lait ont plus de 50 ans.

Du côté du marché

Des stocks européens de beurre se sont reconstitués à la mi-septembre 2019 et la consommation européenne se réduit, ainsi que les exports, au profit de la matière grasse végétale, conséquence des prix élevés 2017- 2018 du beurre. La matière grasse pourrait donc connaître une tendance baissière. Le lactosérum plafonne à 750 €/t suite aux moindres importations chinoises. La Chine sur 2020 sera dans l'incapacité de reconstituer son cheptel porc. Par conséquent, peu d'espoir d'embellie sur le lactosérum à court terme.

La poudre de lait écrémé peut être la locomotive pour tirer les produits industriels : pas de stock, une demande présente et une Europe compétitive par rapport à une Nouvelle Zélande à la peine avec son opérateur Fonterra qui totalise deux exercices consécutifs déficitaires.

Peut-être des perspectives pour un couple beurre-poudre de 295-300 € à comparer aux 280 € constatés en septembre 2019. Quant aux produits de grande consommation, peu d'espérance pour plus de volume. Pour le prix, l'effet EGALIM pourrait s'essouffler suite à la compétitivité grandissante des marques distributeurs comparées aux marques des fabricants.

Du côté géopolitique

Le Brexit

Il génère un attentisme des opérateurs. Le tiers du lait britannique consommé est importé de l'UE. Même si l'export français au Royaume-Uni ne représente que 3 % de la ferme française, l'impact d'un « hard Brexit » par ricochet peut être de nature à déstabiliser le marché UE. 

La déstructuration des relations commerciales internationales

Outre la guérilla Chine/Usa, le protectionnisme américain s'affirme et la promesse de Donald Trump de taxer les fromages européens en réponse aux aides à Airbus en est l'expression. Les exportations peuvent donc connaître des vicissitudes diverses dans un contexte de croissance économique mondiale qui s'essouffle.

Du côté des producteurs

2019 donne un mieux de 8 €/1 000 l par rapport à 2018 pour le producteur soit 340 €/1 000 l pour les 12 derniers mois glissants à compter de 07/2019 en prix de base. Avec la plus-value liée à la qualité, c'est 350 à 365 € payé au producteur en moyenne. Pour rappel, le prix de revient selon les zones s'échelonne entre 370 € et 400 €/1 000 l. Il est donc encore difficile de rémunérer pleinement les facteurs de production pour la majorité des éleveurs.

2020 peut-elle booster le prix du lait ?

Le couple beurre-poudre peut-être le vecteur d'espoir si les importations chinoises restent dynamiques mais il faudra savoir rester prudent sur les espoirs d'embellie considérant que 2020 pourrait être au mieux porteur d'une même évolution que 2019, soit 8 à 12 €. Dans ce contexte, la meilleure assurance demeure la gestion de son coût de production mais aussi la recherche de valorisation par la segmentation qui se développe en lait conventionnel et peut constituer des pistes de valeur ajoutée pour les producteurs.

Article extrait de la Veille économique de nov. 2019 - Jean-Yves MORICE - cerfrance