Panzani : des blés durs 100% français et 100% responsables

C’est l’objectif que se fixe à l’horizon 2025 le fabricant français de pâtes alimentaires, qui accompagne et rémunère à hauteur de 20 €/t les engagements agroécologiques des agriculteurs. Accessoirement, Panzani espère renforcer la compétitivité d’une espèce en souffrance.

« Depuis 2019, Panzani s’approvisionne exclusivement en blés durs français et d’ici à 2025, toutes les pâtes Panzani seront fabriquées à partir de blés durs issus de la démarche Blé responsable français ». Cette annonce, le directeur général de Panzani, Albert Mathieu, l’a faite dans un champ de blé dur situé à Juzes (Haute-Garonne) appartenant à Vincent Jonquières, adhérent de la coopérative Arterris, premier collecteur national de blé dur (bon an mal an 200 000 t) et premier fournisseur de Panzani. « Le blé dur est la seule céréale entièrement dédiée à l’alimentaire humaine, rappelle Albert Mathieu. Les pâtes alimentaires cumulent des vertus économiques et nutritives telles que deux tiers des familles françaises en consomment deux fois par semaine. Avec la démarche Blé responsable français, aux côtés de ses partenaires que sont les agriculteurs et leurs coopératives, Panzani s’engage à préserver la production française de blé dur, en l’assortissant de gages de proximité, de qualité et de respect de l’environnement ».

Vincent Jonquières et son père Christian
Vincent Jonquières et son père Christian

1000 ha de bandes fleuries, 5000 perchoirs et nichoirs

Validée en début d’année, la démarche Blé responsable français (BRF) a été co-construite avec les coopératives partenaires de la marque. Elle s’est appuyée sur des comités techniques rassemblant des experts de la recherche publique et privée, le tout sous la gouverne d’un comité scientifique institué par Panzani en 2016. « Outre l’approvisionnement exclusif en blé dur français, la démarche BRF comprend plusieurs engagements environnementaux visant notamment à préserver la biodiversité, indique Cécile Renault, directrice R&D et RSE de la marque. A l’horizon 2025, la démarche se traduire par la mise en place de 1000 ha de bandes fleuries et l’installation de 5000 perchoirs et nichoirs ». Outre les classiques recommandations variétales, le cahier des charges encadre la fertilisation azotée (dose totale, fractionnement, forme d’engrais), avec force analyses de sol et outils d’aide à la décision. « Au sein des différentes coopératives partenaires, nous allons mettre en place des Clubs Panzani ayant vocation à accompagner, former et sensibiliser les producteurs », poursuit Cécile Renault. Côté aval, le fabricant est aussi engagé dans la réduction de son empreinte carbone, en maximisant le transport ferroviaire et/ou fluvial entre les silos et ses semouleries de Nanterre (Hauts-de-Seine) et Marseille (Bouches-du-Rhône). « Avec nos semouleries et usines proches des bassins de production que sont le Centre et l’Ouest d’un côté, le Sud de l’autre, Panzani pratique le circuit court à sa manière », déclare Albert Mathieu.

L’agriculteur Vincent Jonquières et l’industriel Albert Mathieu, l’œil rivé sur le blé dur, tournant le dos au tournesol
L’agriculteur Vincent Jonquières et l’industriel Albert Mathieu, l’œil rivé sur le blé dur, tournant le dos au tournesol

Une prime de 20 €/t

L’adossement de la démarche BRF à un label officiel est en cours de réflexion chez Panzani. Le fabricant bonifie sa démarche d’une prime spécifique de 20 €/t, l’agriculteur héritant de 12 €/t contre 8 €/t pour la coopérative. « Vu le niveau des cours actuels, le montant de la prime est relatif mais il ne faut pas s’en tenir à la conjoncture actuelle mais se projeter sur le moyen et long terme, juge Vincent Jonquières. Le fait d’être engagé dans ce label, c’est aussi la reconnaissance d’un savoir-faire et la fierté de participer à l’alimentation des Français, en étant le plus respectueux et le plus vertueux possible ». Le céréalier consacre 145 ha au blé dur sur les 350 ha qu’il exploite avec son frère. Son mode de conduite était déjà très proche du cahier des charges BRF, les bandes fleuries mises à part, qu’il s’apprête à intégrer à ses SIE.

Pour Arterris, dont le blé dur représente environ 25% de sa collecte de grain, l’espèce revêt une importance capitale. « Notre partenariat avec Panzani remonte à 1995, déclare Jacques Groison, directeur du pôle agricole de la coopérative. Le rôle de la coopérative est de développer des filières d’excellence dans le but de pérenniser les productions sur le territoire. La démarche BRF s’inscrit dans cette stratégie. La prime permet de compenser des investissements supplémentaires inhérents aux démarches additionnelles de durabilité ».

Le blé dur sujet à la compétition entre espèces

Pour Panzani, le blé dur est juste une question existentielle. Or depuis une dizaine d’années, les surfaces et la production de blé dur ont été divisées par deux en France sous l’effet conjugué de multiples facteurs : des prix et une marge brute qui rivalisent toujours difficilement avec ceux des autres céréales, une forte variabilité des rendements et de la qualité en lien avec les phénomènes climatiques toujours plus paroxystiques, une absence d’incitation significative au niveau des politiques agricoles et des facteurs aggravants tels que la pression foncière ou le mitage. La guerre en Ukraine n’arrange pas la situation car le blé dur échappe (relativement) aux phénomènes d’envolée des cours et de pénurie, ce qui l’expose potentiellement à une compétition accrue avec les autres productions. Pas de quoi faire perdre le Sud à Vincent Jonquières, dont la sole compte déjà 100 ha de tournesol, aux côtés du blé tendre, de l’orge, du maïs ou encore du colza semence. « Les cours du blé dur restent élevés et la rentabilité est au rendez-vous », affirme-t-il.

"Les pâtes permettent d’alimenter une famille de cinq personnes pour moins d’un euro"

De son côté, Panzani espère que sa démarche Blé responsable français participera à préserver l’attractivité de l’espèce, tout en ménageant le pouvoir d’achat des consommateurs. « La guerre en Ukraine n’a pas eu d’impact sur la disponibilité en blé dur et sur le prix des pâtes en rayon, même si nous subissons la hausse des prix de l’énergie et du packaging, affirme Albert Mathieu. Les hausses de prix, de l’ordre de 15%, remontent à l’automne 2021 et étaient liées à la chute de production au Canada. Le prix d’un paquet de 500 g était passé de 71 à 91 centimes. Les pâtes permettent d’alimenter une famille de cinq personnes pour moins d’un euro ». Enfin un produit à la fois disponible et au prix à peu près stable.