Du choc climatique à l’évaporation de nos agriculteurs

[Edito] En 2022 se mettront en œuvre les plans d’action d’adaptation au changement climatique, à l’échelle territoriale. L’enjeu est capital. Mais à quand le plan de lutte contre la tornade démographique ?

Préparer chaque agriculteur à demain : telle est la feuille de route des Chambres d’agriculture pour 2022. La formule n’a rien de prosaïque mais se veut au contraire très pragmatique. Le chantier va commencer par l’appropriation de la Pac, dont la réforme sera effective le 1er janvier 2023. Mais une partie des enjeux va se jouer dès cet été, avec les emblavements conditionnant les aides 2023, dont les écorégimes. Dès ce printemps, les chambres vont déployer une « calculette » numérique permettant à chacun de jauger son degré d’éligibilité à ce nouveau dispositif, mais plus largement à l’ensemble des aides.

Les Chambres vont aussi s’impliquer dans la mise en avant des nouvelles Maec forfaitaires dites de transition agroécologique, portant sur la réduction des phytos, la décarbonation et l’autonomie protéique, avec l’espoir de susciter une forte adhésion et de voir leur budget rehaussé au fil des ans.

Des plans d’action climatique...

2022 fera aussi office de rampe de lancement au conseil stratégique, institué par la séparation de la vente et de conseil des produits phytosanitaires. Au-delà de ces sujets, o combien fondamentaux car percutant le quotidien des exploitations, les chambres vont s’attaquer à un chantier autrement plus sorcier qu’est celui de l’adaptation au changement climatique. En 2021, elles ont procédé aux diagnostics d’impacts, région par région, voire petites régions par petites régions agricoles. Il ne reste plus qu’à inventorier les leviers d’action et à les activer.

C’est tout l’objet du Varenne de l’eau et du changement climatique dont la restitution est imminente. Le Varenne a déjà accouché d’un projet de loi en matière de gestion des risques. Il reste à baliser la feuille de route des deux autres chantiers, très imbriqués, que sont les parades climatiques et la gestion de l’eau. Les chambres, encore elles, sont toutes désignées pour être à la manœuvre dans le déploiement des mesures d’adaptation, en lien étroit avec les filières, les collectivités territoriales et l’Etat.

... mais des agriculteurs qui s’évaporent

Le défi climatique est loin d’être gagné mais il est érigé au rang de priorité nationale et il va désormais résonner à l’oreille de chaque agriculteur, et plus seulement en termes d’impacts mais de solutions, ou d’esquisse de solutions, l’humilité étant de rigueur face aux éléments naturels.

On aimerait que la profession et les pouvoirs publics s’emparent plus ostensiblement d’une autre bombe à retardement qu’est le précipice démographique des actifs agricoles. Car derrière les autosatisfecits sur la persistance et la résilience de notre modèle humain familial, sur la croissance continue des productions sous signes de qualité et/ou vendues en circuits courts, nos agriculteurs s’évaporent. Subrepticement mais sûrement. L’installation partage avec le climat sa dimension systémique. Les sécheresses, les pics de chaleurs, les abats d’eau et autres gelées tardives font écho aux défauts de rémunération et de considération, aux difficultés d’accès au métier, à la pénibilité, à la charge mentale etc. Mais puisqu’on s’attaque au climat... Préparer chaque agriculteur à demain : très bien. Mais à condition qu’il y ait encore des agriculteurs demain.