Le Parlement européen se prononce en faveur des NGT

Le texte adopté distingue deux catégories de variétés issues de Nouvelles techniques génomiques (NGT en anglais), dont l’une serait exemptée des règles s’appliquant aux OGM, assorti d’une obligation d’étiquetage et de l’interdiction de breveter. Après la Commission et le Parlement, reste au Conseil de l’UE à trouver le consensus final.

« L’objectif est de rendre le système alimentaire plus durable et résilient en développant des variétés végétales améliorées résistantes au climat, résistantes aux ravageurs, offrant des rendements plus élevés ou nécessitant moins d’engrais et de pesticides » : c’est ainsi qu’a justifié le Parlement européen son vote en faveur des NGT, plus exactement l’exemption, pour les NGT relevant de la catégorie 1, des exigences prévues par la législation sur les OGM. Cette dernière requiert une évaluation des risques, une procédure d’autorisation de mise sur le marché, des méthodes de détection appropriées et des exigences en matière de traçabilité et d’étiquetage. Selon le texte du Parlement, la législation sur les OGM s’appliquerait en revanche aux NGT de catégorie 2 (NGT2), se distinguant des NGT1 par le nombre de mutation opérées, et laissées à l’appréciation de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Obtenus par mutagénèse ciblée ou par cisgénèse, les NGT1 seraient ainsi considérés comme équivalents aux végétaux conventionnels.

Dans la continuité de l’EFSA et de la Commission

En 2022, l’EFSA avait conclu qu'il n'existait pas de nouveaux dangers spécifiquement liés à la mutagénèse ciblée et à la cisgénèse, relevant que les plantes produites au moyen de ces techniques subissaient des modifications mineures, susceptibles de se produire naturellement ou dans le cadre de techniques traditionnelles de sélection. C’est sur cette base scientifique que la Commission européenne avait adopté en juillet dernier un texte ouvrant à la voie à la mise sur le marché de variétés issues des NGT, distinguant elle aussi NGT1 et NGT2.

Dans un rapport publié en décembre dernier, l’Anses avait appelé à « clarifier plusieurs définitions ou mécanisme de classement et le champ d’application des techniques visées » et pointait par ailleurs « certaines limites scientifiques et sanitaires dans la construction des critères ».

Les NGT sont apparues avec la technique de réécriture du génome « CRISPR-Cas9 », mise au point en 2012 et alliant, précision, célérité, facilité et faible coût de mise en œuvre. A la différence des OGM, les NGT ne reposent pas sur la transgénèse (introduction de matériel génétique provenant d’espèces non compatibles) mais sur la mutagénèse (mutation du génome sans introduction de gènes) ou sur la cisgénèse (insertion de matériel génétique d’une plante sexuellement compatible).

Etiquetage, non brevetabilité

Sur plusieurs points, le texte adopté par le Parlement européen diffère cependant de celui proposé par la Commission européenne qui soustrait les NGT1 aux procédures d’évaluation des risques sanitaires et environnementaux, de traçabilité ou encore d’information du consommateur par le biais de l’étiquetage. Le texte du Parlement inclut les exigences de traçabilité et d’étiquetage. En ce qui concerne la brevetabilité, les eurodéputés se sont prononcés en faveur de « l’interdiction totale des brevets déposés pour l’ensemble des végétaux NGT, le matériel végétal, les parties de ceux-ci, les informations génétiques et les caractéristiques des procédés qu’ils contiennent, afin d’éviter une insécurité juridique, une augmentation des coûts et de nouvelles dépendances pour les agriculteurs et les éleveurs ».

Comme la Commission, le Parlement exclut l’usage des NGT en agriculture biologique. La Fnab, qui dénonce un « déni de la science », estime que le « pire » a été évité à l’endroit de l’AB, louant la possibilité laissée aux Etats membres de mettre en place des moratoires contre la culture de ces NGT sur leur territoire mais s’inquiétant de la clause de revoyure de 7 ans.

La France favorable, les ONG opposées

Sous les ministères de Julien Denormandie et de Marc Fesneau, la France a toujours défendu les principes d’une législation distinguant les NGT, plus précisément les NGT1, des OGM. « On a besoin de ces technologies, a déclaré le ministre de l’Agriculture le 11 décembre dernier en marge d’un Conseil des ministres de l’Agriculture. On ne peut pas à la fois porter la volonté de transition, la volonté d'avoir à disposition du matériel végétal permettant à la fois de réduire l'utilisation des pesticides et avoir du matériel végétal qui permette de lutter contre les effets du dérèglement climatique, c'est à dire qui résiste mieux à la sécheresse, à la chaleur, et ne pas se douter d'un outil qui est en train de se multiplier dans le monde avec des clauses de sécurité ».

Le Collectif en faveur de l’innovation variétale, rassemblant 30 organisations agricoles, dont plusieurs à vocation semencière (FN3PT, FNAMS, Semae, UFS...) et d’autres affiliées affiliées à la FNSEA, ont salué un vote « responsable » des eurodéputés.

Plusieurs ONG s’opposent en revanche à la « déréglementation » proposée par la Commission et le Parlement, assimilant les NGT à des « OGM cachés ». « Les membres du Parlement européen ont manqué à leur devoir de protéger la santé des citoyens, l’environnement et l’avenir de l’agriculture européenne » a réagi Générations futures au texte adopté par les eurodéputés.