Les Français consomment toujours moins d’alcool... et encore moins de vin

Outre l’effet volumétrique imputable pour partie aux 18-34 ans, la dernière enquête de FranceAgriMer et du CNIV pointe une distanciation croissante des Français dans leur rapport au vin. La consommation de vin est désormais talonnée par celle de bière, en hausse, sur fond de baisse générale de la consommation d’alcool.

« La consommation de boissons alcoolisées connaît un repli de 4 points par rapport à 2015 sur l’ensemble des Français (...) 19 % des Français déclarent ne consommer aucune boisson alcoolisée soit une tendance en progression de 4 points par rapport à 2015 (...) La population des18-34 ans a un taux de consommation de vin plus faible que l’ensemble de la population et plus nettement en baisse (...) Une proportion importante des 18-24 ans n’ont jamais bu de vin et ne boivent pas d’alcool (...). Tels sont les éléments saillants de l’enquête Ipsos Observer pour FranceAgriMer et le Comité national des interprofessions des vins à appellations d’origine et à indication géographique (CNIV).

Décalée pour cause de Covid, la dernière livraison porte sur l’année 2022. Il s’agit de la 9ème enquête quinquennale depuis 1980. Elle ne constitue pas une surprise pour la filière, parfaitement au fait du phénomène lancinant de déconsommation et pour cause : 4,4Mhl, soit 10% de la production, ont été envoyés à la distillation en 2023 tandis que Bordeaux s’apprête à arracher 8000 ha de vignes, soit 7% du vignoble.

Mais l’enquête n’apporte pas non plus d’éléments de réassurance, bien au contraire. Outre les effets volumétriques, l’étude pointe une distanciation croissante des Français dans leur rapport au vin. « Le « French paradox » est beaucoup moins d’actualité et l’allégation « le vin c’est bon pour la santé » remporte beaucoup moins d’adhésion en 2022 qu’en 2015 (...) Les réponses aux questions d’opinions et d’attitudes vis-à-vis du vin semblent indiquer un éloignement progressif des Français à l’égard du produit (...) Les dimensions plaisir, connaissance et intérêt sont beaucoup moins actives (...) Cette distanciation est plus marquée auprès des plus jeunes, les moins de 35 ans, mais aussi des 35 à 49 ans (...) Les jeunes montrent une plus faible proximité à l’égard au vin par rapport à l’ensemble de la population, en particulier les 18-24 ans »

Evolution des fréquences de consommation depuis 1980 (Source : enquête quinquennale sur la consommation de vin en France 2020 - Ipsos Observer pour FranceAgriMer et CNIV)
Evolution des fréquences de consommation depuis 1980 (Source : enquête quinquennale sur la consommation de vin en France 2020 - Ipsos Observer pour FranceAgriMer et CNIV)

Moins de consommateurs réguliers, plus de non-consommateurs

Entre 2015 et 2022, la part de non-consommateurs (sinon à titre très exceptionnel à l’occasion des mariages et fêtes de fin d’année) est passée de 33% à 37% tandis que celle de consommateurs réguliers (tous les jours ou presque) est passée de 16% à 11%. Si les consommateurs réguliers tendent à disparaitre, ils sont encore 18% chez les plus de 50 ans. Majoritaire, la consommation occasionnelle concerne, comme en 2015, 51 % des Français de 18 ans et plus. « Le vin conserve une place non négligeable dans la consommation des Français : 71 % de la population en consommant au moins une fois dans l’année, pointe l’étude. Néanmoins, cette consommation est désormais majoritairement ponctuelle ».

Fréquence de consommation de vin en fonction des tranches d’âges en 2022 (Source : enquête quinquennale sur la consommation de vin en France 2020 - Ipsos Observer pour FranceAgriMer et CNIV)
Fréquence de consommation de vin en fonction des tranches d’âges en 2022 (Source : enquête quinquennale sur la consommation de vin en France 2020 - Ipsos Observer pour FranceAgriMer et CNIV)

Effet générationnel

Selon les l’étude, dans un contexte de recul de la consommation d’alcool en général, les 18-34 ans représentant 25% des non-consommateurs d’alcool, soit +6 points qu’en 2015. « Les générations plus jeunes consommant essentiellement de manière occasionnelle, voire n’ont pas du tout intégré le vin dans leur consommation ». Le goût et le désintérêt pour le produit constituent les principaux freins à la consommation des jeunes, en particulier chez les 18-24 ans ce qui n’est pas le cas chez les 25-34 ans. La concurrence d’autres boissons est également forte, en particulier chez les 18-24 ans. Les jeunes manquent aussi de connaissance ou sont intimidés. En revanche, le vin n’est pas davantage perçu comme un produit cher par cette cible, le prix n’est donc, a priori, pas le frein majeur à sa consommation.

Nombre moyen de jours de prise par boisson en 2015 et 2022 (Source : enquête quinquennale sur la consommation de vin en France 2020 - Ipsos Observer pour FranceAgriMer et CNIV)
Nombre moyen de jours de prise par boisson en 2015 et 2022 (Source : enquête quinquennale sur la consommation de vin en France 2020 - Ipsos Observer pour FranceAgriMer et CNIV)

Parmi les boissons alcoolisées concurrentes figure la bière, la seule qui voit sa consommation progresser et se rapprocher des niveaux de consommation du vin. En termes de nombre annuel moyen de jours de prise, la bière est la seule boisson alcoolisée qui augmente avec 10 jours de prises supplémentaires, alors que les vins tranquilles baissent fortement par rapport à 2015 (-17 jours de prise).

A défaut de réassurance, l’enquête réaffirme une valeur refuge : celle de la convivialité. Le vin accompagne de façon privilégiée les repas améliorés ce qui le différencie et le singularise par rapport aux autres boissons. Le vin est particulièrement présent sur les tables lors des repas conviviaux avec des amis, à domicile comme au restaurant. L’apéritif constitue une occasion spécifique où les vins blancs et rosés sont consommés, mais pas régulièrement. Les occasions « apéritif » privilégient les vins effervescents, les vins doux et les autres boissons apéritives. Mais si les effervescents sont la première boisson consommée à l’apéritif... la bière est la plus ancrée dans le quotidien lors de cette occasion.