Achat de terres par des sociétés financières: il est urgent d'agir (Safer)

Après le rachat très médiatisé de terres céréalières par des investisseurs chinois, il est urgent d'agir et d'empêcher que des "sociétés opaques" rachètent et exploitent des parcelles agricoles en France, ont réclamé mercredi les Safer.

"L'enjeu, c'est qu'un État puisse savoir qui détient le foncier agricole" et qui l'exploite réellement, souligne lors d'une conférence de presse Emmanuel Hyest, céréalier et président de la Fédération nationale des Safer, organismes chargés de veiller à l'aménagement rural et foncier. Le rachat de 900 hectares dans l'Allier en 2017, et de 1.700 hectares dans l'Indre en 2016 par le groupe HongYang a été "le déclencheur de l'émotion". Mais le problème n'est pas la nationalité de l'investisseur car l'accaparement des terres en France est aujourd'hui essentiellement le fait de sociétés françaises, explique Jacques Chazalet, président de la Safer Auvergne-Rhône-Alpes, lui-même éleveur dans le Puy-de-Dôme.    Aujourd'hui, 20% des terres agricoles sont exploitées en France par des sociétés alors qu'il n'y en avait aucune il y a 10 ans, soulignent ces agriculteurs.

Le risque, selon eux, est de mettre en péril le modèle d'agriculture familial français avec effets en cascade: menaces sur l'autonomie alimentaire du pays, risques sur la vitalité des campagnes et réduction de l'entretien des paysages. Ils réclament donc que soient distinguées la société qui exploite des terres agricoles de celle qui les détient afin que "le financier" ne soit pas "l'exploitant". Car pour l'instant, on peut "mélanger société propriétaire et société exploitante, et tout ça de manière anonyme" et en touchant les aides de la Politique agricole commune puisqu'"il n'est pas nécessaire d'avoir un statut d'agriculteur pour acquérir du foncier et toucher les aides", relève Jacques Chazalet.

Les Safer, qui disposent normalement d'un droit de préemption, n'ont pas pu l'activer dans le cas chinois en raison d'une brèche juridique qui les empêche d'intervenir quand le rachat ne porte que sur une partie seulement des parts d'une société. De quoi nourrir la réflexion promise il y a quelques jours par le ministre de l'Agriculture, Stéphane Travert, pour rénover les outils de régulation du foncier agricole.