Vins bio : “le marché actuel permet d’absorber les coûts de conversion”

Selon une étude du Cerfrance Gard, le coût de la conversion d’un vignoble à l’agriculture biologique peut atteindre les 100 000 euros. Les écarts actuels de prix entre les vins conventionnels et les vins bio permettent d’absorber les surcoûts de cette conversion, mais cela n’a pas toujours été le cas.

"Pour appréhender les coûts de la production des raisins en agriculture biologique, il est important de prendre en compte non seulement le surcoût à l'hectare, mais aussi l'impact économique des éventuelles pertes de rendement et enfin le coût des trois années de conversion, lors desquelles le vin est vendu au prix du conventionnel", explique Anne-Claire Durel, conseillère d'entreprise au Cerfrance Gard. Lors d'une conférence le 27 novembre 2019 au Sitevi, elle a présenté une étude estimants ces coûts de production afin de déterminer l'écart minimum à atteindre entre les prix des vins conventionnels et ceux des vins bio pour obtenir l'équilibre économique des exploitations en AB. 

Sur la base des données issues de la comptabilité des clients en caves coopératives du Cerfrance Gard et du Cerfrance Midi Méditerranée, il ressort que les écarts de coûts de production du raisin entre bio et conventionnels s'articulent autour de trois facteurs : le coût des intrants (engrais surtout), celui de la mécanisation (GNR, amortissements) et celui de la main d'oeuvre (environ 30 heures de plus en bio par hectare). "Les chiffres montrent un écart de charges entre 500 et 1000 euros par hectare", indique Anne-Claire Durel. 

Avec des rendements pouvant diminuer de 20% lors du passage en bio et le paiement du vin au prix du conventionnel pendant les trois ans de conversion, le surcoût de la conversion peut approcher les 100 000 euros malgré les aides (350 euros par hectare pendant trois ans). Ce surcoût peut cependant baisser grâce à des accords avec certains acheteurs qui proposent de "sur-payer" les vins en conversion, à hauteur de 80 à 90% du cours du bio pour les deuxièmes et troisièmes années de conversion, fait savoir Anne-Claire Durel. 

Un marché favorable au bio

"Pour que la filière bio soit viable sur le plan économique, il est donc indispensable que les écarts de prix avec les vins conventionnels soient élevés", poursuit la conseillère. Cette tendance est à la hausse depuis quelques années : en 2019, l'écart moyen entre bio et conventionnel pour les Côtes du Rhône rouge était par exemple de 72 €/hl, celui des Vins de pays d'Oc rouge de 79 €/hl. Historiquement, ces écarts sont à leur plus haut niveau. 

"Les tendances sont bonnes pour le moment, mais il ne faut pas oublier que par le passé, les écarts étaient beaucoup moins importants, voire parfois nuls", précise Anne-Claire Durel. Ainsi, dans le cas des Vins de pays d'Oc rouge, l'écart moyen sur les cinq dernières années entre bio et conventionnel n'était que de 41 €/hl. "A ce prix-là, le résultat des exploitations en bio est inférieur à celui des exploitations en conventionnel", fait-elle savoir.

Actuellement, le marché du vin permet d'absorber les surcoûts de la conversion à l'agriculture biologique, à condition de maîtriser ses rendements. "Pour la filière bio, il est important de parvenir à conserver les écarts actuels", conclut Anne-Claire Durel, en rappelant que "100 €/hl de plus, ce n'est qu'une hausse de 0,75€ par bouteille".