Se lancer en agriculture de conservation des sols (ACS)

Partie 4/9

Connaître son sol pour évaluer son potentiel de départ

Pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on part. Chaque sol revêt des caractéristiques uniques liées à son propre contexte pédoclimatique et à son histoire culturale. Ainsi, il n’existe pas de recette universelle en ACS mais bien des leviers à adapter selon le moment, le type de sol et les objectifs que l’on s’est fixé.

Pour Frédéric Thomas, agriculteur en Sologne et spécialiste pionnier des techniques sans labour, « passer en ACS, c’est accepter d’être dans un système toujours vivant :  s’adapter en permanence pour résoudre des problématiques à l’instant T… qui par la suite vont en ouvrir d’autres ».

C’est pourquoi avant de débuter toute transition, il est essentiel de connaître son sol et d’évaluer son potentiel de départ par un diagnostic complet.

Diagnostic chimique

Réalisez une analyse de sol pour connaître la richesse et la disponibilité des différents éléments chimiques présents dans votre sol (potasse, phosphore, oligo-éléments…), son alcalinité ou son acidité (le pH) ainsi que son taux de matière organique (MO). « Un sol riche en matière organique est évidemment plus favorable au développement des cultures et sera moins sensible aux aléas climatiques », affirme Gaëtan Bouchot, agriculteur en ACS en Haute-Marne. Attention toutefois : c'est d'avantage la vie du sol que le taux de matière organique lui-même qui doit être pris en compte. Nous y reviendrons un peu plus loin.

Les résultats de vos analyses seront précieux pour mieux connaître la fertilité de votre sol, sa capacité de nutrition pour vos cultures et, le cas échéant, vous alerter sur ses éventuelles carences ou excès afin de piloter votre fertilisation de manière adaptée.

Diagnostic physique

La réalisation d’un profil de sol est également un point clé de votre diagnostic pour en connaître la texture et la structure.

  • Texture

Également appelée granulométrie, la texture de votre sol vous indiquera la proportion des éléments minéraux qui le compose selon leurs tailles : argiles, limons, sables… La présence plus ou moins importante de ces particules minérales conditionne les capacités de stockage d’eau disponibles ainsi que le comportement de votre sol face aux conditions hydriques.

Par exemple, un sol sableux est perméable et filtrant : il est aéré et dispose d’une bonne capacité d’absorption de l’eau mais ne pourra pas en stocker suffisamment pour la restituer en période de sécheresse. A l’inverse, un sol à dominante argileuse dispose d’une forte capacité de rétention d’eau mais présente une aptitude à l’absorption moindre. Sous l’effet d’un travail du sol et/ou de précipitations excessives, il peut se compacter et se prendre en masse pénalisant ainsi la circulation de l’eau et de l’air nécessaires à sa vie biologique et au bon enracinement des cultures.

  • Structure

Connaître la structure de votre sol c’est découvrir son « architecture », c’est-à-dire la manière dont les particules minérales et organiques s’organisent entre elles et dans l’espace. Il s’agit donc de la quantité et de la qualité de leurs liaisons mais également de leur espacement.

Car le sol c’est aussi du vide : les espacements entre ces particules détermineront la porosité de votre sol, c’est-à-dire la capacité de circulation de l’air et de l’eau indispensables à toute vie biologique. Ces espacements forment un réseau de « canaux » : les micropores absorbent et restituent l’eau dont les plantes ont besoin et les macropores contribuent à la respiration des sols et permettent aux racines de s’enfoncer dans le sol.

Un sol idéalement structuré bénéficie d’une porosité équilibrée, les particules de sables et de limons qui le composent sont liées en petites mottes par l'argile, l'humus et le calcium : on parle alors de structure grumeleuse.

Diagnostic biologique

L’observation de votre parcelle et l’analyse d’un échantillon de terre prélevé sur les premiers horizons de votre sol (30 premiers centimètres) vous éclaireront sur sa vie et son activité biologique :

  • La présence et la densité de la faune et de la flore du sol tels que les vers de terre, les champignons, les bactéries et autres organismes qui décomposent la matière organique avant sa minéralisation pour nourrir les plantes, sont à ce titre d’excellents bio-indicateurs de la vie de votre sol.
  • L’analyse de la matière organique (MO) permet de caractériser la répartition de sa composition (MO vivante, MO, fraîche, MO stable) et de calculer son rapport carbone sur azote (C/N). Cet indicateur permet d’évaluer la capacité de la MO à se décomposer plus ou moins rapidement dans le sol avant d’être assimilée par minéralisation.
  • Le recensement de la flore adventice (mauvaises herbes) présente sur vos parcelles est également un point clé : cet inventaire doit vous permettre d’identifier les problématiques potentielles de salissement et d’anticiper la maîtrise de leur développement.
La réalisation d’un profil de sol est une étape clé pour en connaître la texture et la structure (crédits photo : ACS)

A chaque sol son plan d’action

Vous l’aurez compris : préparer sa transition vers l’agriculture de conservation des sols, c’est progressivement vous réapproprier et comprendre le fonctionnement agronomique de votre sol pour construire un plan d’action adapté à votre contexte et à vos objectifs. « La connaissance du sol est un formidable levier de progression pour tous les agriculteurs ! », souligne Sarah Singla, agricultrice ACS en Aveyron et formatrice en agronomie. Par ailleurs présidente de l’association « Clé de Sol » (Réseau Apad), elle contribue largement à la promotion de l’ACS en France par une pédagogie claire, enthousiaste et bienveillante.

 

>> Cliquez ici pour accéder au chapitre 5 : "Démarrer sur un sol sain"

 

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