Se lancer en agriculture de conservation des sols (ACS)

Partie 2/9

L’ACS : au-delà du non labour, une combinaison de solutions agronomiques indissociables

Moins de 2% des exploitations françaises pratiquent actuellement l’ACS et les confusions avec d’autres pratiques culturales lui empruntant certaines techniques sont encore nombreuses. Alors l’ACS… kezako ?

Agriculture de conservation des sols : portrait d'une conversion

A l’échelle mondiale, l’agriculture de conservation des sols (ACS) a été définie par la FAO en 2014 comme « un système garantissant la durabilité de l’usage des sols agricoles » qui repose sur trois principes agronomiques majeurs :

Le non travail du sol associé au semis direct par l’absence de bouleversement mécanique du sol à l’exception du semis.

> Objectifs :  limiter au strict minimum la perturbation de l’activité biologique, favoriser la porosité verticale naturelle du sol et augmenter le taux de matière organique.

La couverture permanente des sols par la conservation des résidus entre les cultures principales ou par l’implantation de couverts végétaux d’interculture.

> Objectifs : aérer les sols par le travail racinaire, stocker les éléments nutritifs avant qu’ils ne soient lessivés, restituer de la matière organique au sol pour alimenter sa biodiversité, protéger la vie du sol des chocs de température et conserver l’humidité du sol.

La diversité végétale sur les rotations culturales et les couverts végétaux par l’implantation de nombreuses espèces végétales et notamment de légumineuses.

> Objectifs : restaurer les équilibres naturels par une biodiversité pour répondre aux besoins alimentaires de la faune et la microflore du sol qui contribuent à améliorer la fertilité naturelle des sols. L’introduction de légumineuses dans les rotations ou les couverts permet également de fixer l’azote atmosphérique pour le restituer sous forme organique et faciliter la rétention d'eau.

Du maïs en agriculture de conservation des sols avec les résidus de la culture précédente (crédits photo : Apad)

Imiter la nature

Le sol abrite une vie considérable entre les micro-organismes (bactéries, champignons…) et les macro-organismes tel que les vers de terre et certains insectes auxiliaires. Ces organismes sont essentiels à la nutrition des végétaux : ils recyclent la matière organique et permettent une cohésion entre les particules minérales du sol, ce qui limite ainsi les phénomènes d’érosion hydrique et éolienne.  

La combinaison simultanée de ces trois piliers vise donc à imiter la nature pour réduire la dégradation des sols et améliorer progressivement leur fertilité en utilisant intensivement ces processus biologiques pour se substituer à l’usage de certains intrants.

Une dynamique réelle

Bien qu’en plein développement ces dernières années, la démocratisation des pratiques d’ACS en France reste encore marginale : elle n’est pratiquée en 2020 que par 1,7% des exploitations françaises selon l’Inrae. Si les bénéfices de l’ACS semblent évidents sur le plan agronomique, beaucoup d’agriculteurs hésitent encore à franchir le pas pour des raisons technico-économiques, dans un contexte fragile pour la trésorerie des exploitations. François Mandin, président de l'Association pour la Promotion d'une Agriculture Durable (Apad), reste néanmoins résolument optimiste et souligne une dynamique réelle : « Nous sommes confiants, car nous sentons monter du terrain une conviction de plus en plus solide, et des résultats sécurisés, qui donnent envie d’y aller. »

Bénéfices agronomiques et économiques

Au-delà de la dimension agronomique et environnementale, les agriculteurs évoquent souvent les bénéfices de l’ACS sur le plan socio-économique. « Le passage à l’ACS m’a permis de réduire mes coûts de production, d’augmenter la fertilité de mes sols, de mes rendements et d’améliorer ma qualité de vie », confirme Gaëtan Bouchot, agriculteur ACS en Haute-Marne.

Bien que peu de chiffres ou statistiques officielles soient disponibles à ce sujet pour étayer cette dynamique économique portée par l’ACS, de nombreuses études mises en avant par l'Apad démontrent que la rentabilité économique est plus importante qu’en agriculture conventionnelle. Les résultats s’expliquent notamment par la réduction des frais de main d’œuvre, de carburant et des charges de mécanisation. Par ailleurs, la diversification des cultures participe à la sécurisation des revenus et à une meilleure résilience face aux aléas climatiques et aux crises économiques.

Un travail au long cours

Fréderic Remy, chef de culture dans le Val d’Oise, est plus mesuré : « En passant en ACS, nous avons certes vendu l’intégralité de notre matériel du travail du sol, mais les économies réalisées sur ces postes sont transférées sur l’achat de matériel spécifique pour le semis direct et sur le budget semences et implantation des couverts ». Selon lui, la rentabilité du système est réelle une fois les emprunts pour le matériel remboursés.

Sur le long terme, l’optimisation des services écosystémiques associés au bon fonctionnement du sol tels que la rétention de d’eau, la valorisation des matières organiques, le maintien de la biodiversité et la séquestration du carbone dans les sols contribueront à améliorer la productivité globale de l’exploitation et sa performance économique.

 

>> Cliquez ici pour accéder au chapitre 3 : "Préparer sa transition vers l’ACS"

 

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