Une proposition de loi pour pallier le manque de saisonniers. Et si les mineurs étaient la solution ?

Face au manque de main d'œuvre auquel sont confrontés les agriculteurs, en particulier l’été, le sénateur Emmanuel Capus propose d’alléger la loi pour permettre le recrutement de mineurs.

Cette proposition de loi est née d’un constat des agriculteurs du Maine-et-Loire qui m’ont alerté que c’était compliqué pour eux d’embaucher des jeunes de 14 à 16 ans. Aujourd’hui les contraintes légales sont très fortes”, explique le sénateur angevin Emmanuel Capus du parti Les Indépendants. Une complexité administrative qui, - encore une fois - ,ne facilite pas la tâche des agriculteurs. {ndlr ; rappelons pour nos lecteurs que c’est une proposition de loi, elle n’a pas encore été examinée au Sénat en séance publique}.

Manque de saisonniers, il faut faciliter le recrutement des jeunes. 

Chaque année, le recrutement de saisonniers s'avère de plus délicat. L’Agence nationale paritaire pour l’emploi et la formation en agriculture (Anefa) en a fait son sujet de campagne avec pour slogan “l’agriculture recrute”. L’Anefa estime que les exploitations françaises nécessitent près d’un million de travailleurs occasionnels. Or recruter, c’est long et difficile. Pourtant, il y a toute une fraction de la population disponible et pas toujours au courant de son accès au travail avant la majorité : les jeunes de 14 et 16 ans +. 

Le président de la République Emmanuel Macron, l’a promis le 5 janvier dernier, Marc Fesneau l’a suivi, tandis que les différents syndicats agricoles le réclament : il faut simplifier les taxes, les lois et les normes. Le sénateur Emmanuel Capus du groupe les Indépendants, saisit l'occasion : le 19 décembre dernier, il dépose une proposition de loi pour assouplir les règles de droit du travail d’emplois saisonniers des personnes mineures. Une démarche qui répond à un constat alarmant : il n’y a plus personne pour aider.

“Une période trop courte” pour venir prêter main-forte dans les champs.

Aujourd’hui, un mineur de 14 ans et plus, ne peut travailler que la moitié des vacances scolaires. Il bénéficie selon l’article L4153-3 du Code du travail “d'un repos continu d'une durée qui ne peut être inférieure à la moitié de la durée totale desdites vacances”. “Or, les jeunes de 14-16 ans ont parfois leur établissement fermé dès le mois de juin en raison des examens, constate le sénateur, donc sur presque trois mois de vacances, le jeune ne pourra travailler qu’un mois”. C’est trop court, selon les agriculteurs concertés. 

Un calendrier météorologique de plus en plus flexible

Les agriculteurs sont dépendants de la météo et “face au réchauffement climatique et ses aléas, il est moins facile pour eux aujourd'hui de prévoir à quel moment ils pourront faire travailler les jeunes”, à savoir dans le temps imparti des vacances scolaires officielles. Pour obtenir des bras supplémentaires, l’agriculteur doit d’abord faire une demande à la médecine du travail (MSA) et à l’inspection du travail avec toutes les précisions nécessaires : âge, missions, durée du temps de travail, rémunération et accords des parents ou du représentant légal. Une anticipation trop complexe

Plus de flexibilité, plus de souplesse… et plus d’emplois

L'objet principal de cette proposition de loi est de supprimer la limite des vacances scolaires pour augmenter le temps disponible pendant les congés scolaires”, résume Emmanuel Capus. Il précise que cette proposition de droit ne s’appliquera - si elle est votée - que dans le cadre des vacances scolaires. “Par définition, le jeune ne peut pas travailler quand il a classe”. Par conséquent, sur 2 mois de vacances, il pourrait être possible pour un mineur entre 14 et 16 ans de travailler, s’il le souhaite, 1 mois et demi par exemple. Pour toute heure supplémentaire, le sénateur espère là encore simplifier les démarches. Aujourd’hui, seules les heures en plus, peuvent être autorisées par la Direccte (direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi). Il souhaite obtenir un assouplissement en modifiant l’article L3162-1 du Code du travail en permettant des dérogations par convention collective ou accord de branche. 

Un “job d’été”, une main d’oeuvre immédiate et une découverte du milieu agricole 

Pour le sénateur, faciliter l’emploi chez les jeunes demandeurs d’un emploi saisonnier, c’est aussi permettre de joindre l’utile à l’agréable : intégrer un milieu pas forcément familier et se constituer une première expérience rémunératrice. Cette proposition de loi souhaite permettre la disponibilité d’une main d'œuvre déjà sur place et ne prend pas en compte la question du logement. “C’est souvent des jeunes du coin”, explique le sénateur. 

“Les garde-fous de cette proposition de loi se mettront en place progressivement”. 

Et si certains en profitaient pour avoir sous la main une main-d’oeuvre docile et bien moins chère qu’un saisonnier majeur, Emmanuel Capus se veut rassurant : ces textes de loi protégeant le travail des mineurs ont été rédigés à une époque “où les enfants travaillaient au fond des mines. Aujourd’hui, les jeunes sont protégés par leur parent et tuteur. Ils sont aussi plus débrouillards”. Concernant les garde-fous, le sénateur rappelle “j’ai voulu proposer un texte pour poser le problème”, ce qui suppose que la loi pourrait être un peu moins large.