Consommation : un équilibre délicat à établir entre producteurs, industriels et distributeurs

La loi présentée mercredi fait suite à vingt ans d'efforts des autorités pour rééquilibrer les relations entre producteurs, industriels et distributeurs. Voici un rappel des principaux textes adoptés précédemment.

Loi Galland

La loi Galland a régi les relations entre industriels et distributeurs de 1996 à 2008, mais été enterrée pour cause de dérives, dont une augmentation des prix des produits de grande consommation de 4% par an. Cette loi avait interdit aux distributeurs, qui avaient pris l'habitude de brader ponctuellement des produits de marque afin d'attirer le consommateur dans leurs rayons, de revendre les produits en dessous du seuil de revente à perte (SRP). Ce SRP, inscrit dans la facture d'achat, était le prix auquel le distributeur avait acheté au fournisseur.  

Parallèlement, au nom du principe de "non-discrimination", les fournisseurs proposaient le même tarif à tous les distributeurs. Ainsi, dans le cadre de cette loi, un fournisseur vendait son produit 100 euros à tous les distributeurs et ces derniers n'avaient pas le droit de revendre pour moins. Concurrence oblige, très vite les enseignes ont commencé à vendre à 100 euros, donc sans marge. Pour compenser cette rigidité, un système officieux s'est vite mis en place: les "marges arrière", des sommes exigées par les distributeurs au titre d'une coopération commerciale, réelle ou non (ils faisaient par exemple payer pour un placement des produits en tête de gondole).  

Les "marges arrière" représentaient en moyenne 30% du prix figurant sur la facture: un produit facturé à 100 euros coûtait finalement seulement 70 euros au distributeur. La loi interdisant de revendre sous 100 euros, les 30 euros restant étaient une marge nette pour les distributeurs.   Parallèlement, les fournisseurs ont augmenté artificiellement leurs tarifs afin d'y intégrer les "marges arrière", renforçant au fil des ans l'augmentation des prix à la consommation.      

LME

La loi de modernisation de l'économie (LME), adoptée en juillet 2008, avait pour objectif de faire baisser les prix des produits de grande consommation et de dynamiser la concurrence. La LME a mis fin à la "non-discrimination" en instaurant la liberté de négociation des prix entre les centrales d'achat des grandes surfaces et leurs fournisseurs. L'idée sous-jacente étant d'augmenter le pouvoir d'achat des consommateurs, en favorisant des baisses de tarifs. Toutefois, selon ses détracteurs, ce dispositif a renforcé l'opacité entourant la formation des prix. La loi LME, ainsi que et la loi Chatel de 2008 "pour le développement de la concurrence au service des consommateurs", ont fortement limité le recours aux marges arrières. Mais les agriculteurs leur ont reproché d'avoir trop dérégulé les négociations et surtout de ne pas prendre en compte les intérêts des producteurs (qui n'étaient pas partie prenante des négociations organisées principalement entre les enseignes de distribution et les industriels de l'agroalimentaire).

Aménagements

Des aménagements à la LME ont été pris en 2013 et 2014 pour tenter de rééquilibrer les rapports de force dans les négociations commerciales entre l'amont des filières et les distributeurs. Sont alors inclus, dans les contrats négociés entre producteurs, transformateurs et grande distribution, des "clauses de renégociation" qui intègrent l'évolution des coûts de production, très dépendants des fluctuations du marché des matières premières.Pour favoriser la loyauté et la transparence, les contreparties liées à une réduction de prix doivent être formalisées dans la convention annuelle fixant le résultat de la négociation commerciale, afin d'être vérifiables. Mais les acteurs de la filière agricole ont estimé que le dispositif n'était pas respecté par la distribution, qui conserve l'avantage dans ce rapport de force. Pour apporter plus de transparence sur les profits de l'industrie agroalimentaire, le Parlement a également adopté en novembre 2016 le projet de loi "Sapin II" avec une disposition indiquant que les entreprises ne publiant pas leurs résultats risqueront une astreinte financière de 2% du chiffre d'affaires journalier.