La Confédération paysanne opposée à la réintroduction des néonicotinoïdes

Le syndicat relativise l’impact de la jaunisse et estime que la compétition internationale prévalant dans la filière betterave-sucre "conduit la majorité des producteurs dans le mur et pousse à des modes de production intensifs et spécialisés au détriment de la durabilité des agroécosystèmes et de la biodiversité".

Après le Modef, la Confédération paysanne marque à son tour sa différence sur le dossier de la jaunisse de la betterave. Alors que le gouvernement s'est engagé à réautoriser temporairement et sous conditions l'emploi de semences traitées avec des néonicotinoïdes, le syndicat attaque la décision sur plusieurs fronts, à commencer par celui de la nuisibilité de la maladie. "En 2019, la gravité des dégâts dus à la jaunisse nanisante est restée très faible avec en moyenne 1,5 % de la surface touchée à l'échelle nationale", écrit la Confédération dans un communiqué. "Les dégâts sont probablement plus importants cette année, mais l'incidence économique globale de la jaunisse ne sera pas aussi catastrophique qu'affirmé". Sans nier la réalité des cas d'attaque sévère, le syndicat redoute un recours généralisé aux semences traitées en 2021 en lieu et place d'un usage circonstancié.

"Des alternatives existent"

La Confédération paysanne reste opposée à l'utilisation de tous les néonicotinoïdes à "la demi-vie très longue", menaçant l'Homme de "toxicité neurologique, perturbation endocrinienne, génotoxicité et cytotoxicité", sans compter les effets sur les invertébrés terrestres et aquatiques, les insectes pollinisateurs, les oiseaux, les poissons, les amphibiens et les bactéries. Le syndicat rappelle que des insecticides moins dangereux ont apporté la preuve de leur efficacité, se référant aux travaux de l'Institut technique de la betterave relatés dans le Betteravier français en début d'année. "Les alternatives existent", affirme la Conf. "Elles nécessitent de repenser les modes de production en plaçant les cultures dans un écosystème comportant des ravageurs mais aussi des alliés. La santé des plantes ne peut être pensée de façon isolée. Haies, rotations assez longues, taille raisonnable des parcelles, diverses méthodes de lutte biologique dont la conservation des habitats des auxiliaires, biostimulants, traitements aux huiles essentielles, etc. peuvent permettre de mieux réguler les populations de pucerons".

Les variétés tolérantes aux herbicides dans le viseur

Le syndicat voit dans l'épisode des néonicotinoïdes un symptôme du jusqu'au-boutisme productif qui prévaut depuis la suppression des quotas et du prix minimal garanti. "Poussée par les industriels privés ou coopératifs, la compétition internationale sur la production du sucre, alcool et amidon, pour l'alimentation ou l'énergie, conduit la majorité des paysan·ne·s dans le mur et pousse à des modes de production intensifs et spécialisés au détriment de la durabilité des agroécosystèmes et de la biodiversité". Le syndicat n'épargne pas la CGB et la FNSEA qui "entraînent leurs adhérent·e·s dans le repli de la victimisation".

Sur un autre sujet, les pouvoirs publics en prennent aussi pour leur grade, le gouvernement ayant, selon la Confédération paysanne, passé outre les "injonctions du Conseil d'État l'obligeant à publier au plus tard le 7 août le décret engageant la réglementation comme OGM des variétés rendues tolérantes aux herbicides de colza CL", "un signal désastreux allant dans le sens de la protection d'intérêts économiques particuliers aux dépens de l'intérêt général".