« Nous essayons de faire notre métier le mieux possible et nous aimerions bien gagner notre vie avec » (J. Decerle)

Les Jeunes agriculteurs s’apprêtent à recevoir 100 000 visiteurs tout au long de ce weekend à l’occasion de Terres de Jim, évènement organisé dans l’Oise. Rencontre avec Jérémy Decerle, le président des JA.

Pouvez-vous rappeler l'objectif de Terres de Jim ?

Jérémy Decerle : Avec Terres de Jim, nous souhaitons montrer au grand public les atouts de notre métier via la dégustation de produits, l'exposition de matériels agricoles et des animations pour les enfants et les grands. La jeunesse agricole est encore motivée pour parler du métier et faire connaître ses bienfaits au plus grand nombre. Accueillir 100 000 personnes sur trois jours, ce n'est pas une mince affaire. Cela démontre la capacité des Jeunes agriculteurs à organiser un tel évènement. Je tiens d'ailleurs à féliciter l'engagement de tous les bénévoles. Cette année, le temps est un peu mitigé... Mais qu'il pleuve ou qu'il vente, nous sommes prêts pour accueillir les visiteurs.

Est-ce que c'est possible de réconcilier la société avec l'agriculture ?

J.D : Je ne sais pas s'il existe une si grande défiance envers la profession agricole. Mais je pense que la réconciliation est indispensable. Nous devons discuter, parler, communiquer avec le grand public, pour faire comprendre que l'agriculture est encore une chance pour le pays, pour les territoires ruraux ou urbains.

Pourtant, le fossé entre l'agriculture et le grand public semble toujours se creuser. Sur la question du glyphosate, par exemple, les agriculteurs peinent à faire entendre leurs arguments...

J.D : Sur ces questions de société, comme l'écologie, nous souhaiterions un maximum de pragmatisme. Dans les journaux, on parle d'interdire le glyphosate en France. Mais que fait-on pour interdire les importations de produits agricoles pour lesquels on a utilisé du glyphosate ? Nous demandons un peu plus de cohérence politique.

Ce qu'il faut expliquer à la société, c'est que beaucoup de progrès ont été réalisés par les agriculteurs. Il y a des jeunes qui se sont installés ces dernières années et qui assurent leur production grâce au glyphosate. Demain matin, on va leur dire qu'ils n'ont plus le droit d'utiliser cette substance active, sans aucun produit de substitution ? Pourquoi arrêter le gasoil en 2040 et pourquoi et arrêter le glyphosate demain matin ? Où est la logique ?

Le secteur agricole a plutôt besoin de meilleures perspectives économiques. Si les citoyens nous posent des questions, voilà ce que nous répondrons :  nous ne sommes pas là pour empoisonner les sols et les gens. Nous essayons de faire notre métier le mieux possible et nous aimerions bien gagner notre vie avec. Nous voudrions que l'État dépense plus d'énergie à trouver des produits de substitution qu'à interdire le glyphosate du jour au lendemain. Mr Macron, dans son programme, évoquait une suppression progressive des produits phytosanitaires. En l'occurrence, Nicolas Hulot ne parle plus de progressivité.

Vous plaidez pour une agriculture avec des paysans nombreux. Quelles sont les tendances en matière d'installation ?

J.D : Selon les derniers chiffres de l'installation, qui datent de 2016, le nombre d'installations ne diminue pas. Mais nous aimerions des résultats plus probants, afin qu'un jeune s'installe à chaque fois qu'un cédant arrête son activité. C'est un challenge peut être ambitieux mais vue l'affluence dans les écoles d'agriculture, on peut réussir. C'est un tout. Le sujet de l'installation est très lié aux questions de politique agricole du moment : attractivité du métier, capacité à faire reconnaître l'agriculture comme un secteur stratégique pour la France. Il n'est plus possible de continuer à mettre en avant la gastronomie française en laissant dépérir les agriculteurs.