Sanctions américaines : les exportateurs de vins français digèrent la "mauvaise nouvelle"

Les producteurs de vin et de fromage français, ciblés par la menace de droits de douanes punitifs des États-Unis, s'inquiètent pour leurs exportations vers ce pays qui représente une destination de choix.

"C'est une mauvaise nouvelle pour le secteur et nos professionnels. Nous déplorons cette décision qui va à l'encontre de l'ouverture du commerce", a déclaré lors d'une conférence de presse le 3 octobre Antoine Leccia, président de la fédération des exportateurs de vins et spiritueux (FEVS). Alors que les importations de vins français aux États-Unis vont être frappées de 25% de droits de douanes supplémentaires, la FEVS a demandé dans un communiqué aux autorités de résoudre le différend qui les oppose dans le domaine aéronautique afin d'obtenir la suppression de ces mesures qui touchent selon elle "arbitrairement" le secteur du vin.

Dans un conflit qui dure depuis 15 ans, les États-Unis et l'Union européenne (UE) s'accusent en effet mutuellement de verser des aides publiques illégales à leurs sociétés d'aviation Airbus et Boeing. Le 2 octobre, l'Organisation mondiale du commerce (OMC) a autorisé Washington à prendre des sanctions tarifaires record sur les biens et services de l'UE, incluant les produits agroalimentaires.

Les sanctions américaines vont s'appliquer aux bouteilles de vin tranquille (par opposition au vin effervescent) de deux litres ou moins et ayant un degré d'alcool inférieur ou égal à 14%. Les spiritueux et le champagne ne sont pas concernés par les sanctions. Les États-Unis représentent le premier marché d'export de vins et spiritueux français (3,2 milliards d'euros de chiffre d'affaires sur un total de 13,2 milliards en 2018 au niveau mondial). Les seuls produits visés par l'augmentation des droits de douane ont représenté un milliard d'euros de ventes sur le marché américain en 2018, soit environ 14 millions de caisses de 9 litres, selon les chiffres de la FEVS. 

Selon M. Leccia, ces droits de douane supplémentaires auront des répercussions négatives en priorité sur les vins les moins chers. Pour remplacer les vins français à moins de 15 euros la bouteille, "ce sera facile [pour les consommateurs] d'aller chercher des vins chiliens ou italiens", qui, eux, ne sont pas touchés par les sanctions. "Nous sommes inquiets de la baisse des volumes que ça peut représenter", a souligné M. Leccia, tout en mettant en garde contre le risque de perte de rentabilité, "car on va baisser les prix pour maintenir nos parts de marché". Il attend donc "une grande vigilance pour nos entreprises de la part de l'État".

Pour la FNSEA, "l'agriculture démontre une fois de plus son caractère géostratégique en faisant les frais des tensions commerciales internationales sur des sujets qui ne la concernent en rien". Le syndicat majoritaire attend donc des pouvoirs publics qu'ils "envisagent dès à présent les mécanismes permettant de passer le cap".

Le secteur laitier s'inquiète également pour la santé de ses entreprises, qui ont exporté l'an dernier 25 000 tonnes de fromages vers les États-Unis, pour un montant de 176 millions d'euros. "Ce sont les PME qui vont subir les premières conséquences", de ces mesures, assure la présidente de l'association Fromage de Terroirs, Véronique Richez-Lerouge, car elles avaient depuis quelques années une "stratégie vers les États-Unis" en fabriquant une "version pasteurisée des fromages" comme le chaource, l'époisses et l'ossau-iraty.