Les dix points à savoir sur la prochaine Pac

Les propositions mises sur la table par la Commission européenne pour la prochaine Pac ont globalement été validées fin octobre par le Conseil des ministres des 27, puis par le Parlement européen. Voici les grandes lignes de ces accords et leurs points de divergence.

1-La nouvelle Pac s’appliquera en 2023

Le calendrier a été décalé : la nouvelle Pac s’appliquera en 2023. Le Conseil des ministres et le Parlement, avec la médiation de la Commission, doivent trouver un accord selon le processus de co-décision (trilogue), pour une publication des règlements d’ici mars-avril. La France doit remettre la copie de ses choix nationaux à la Commission en juin. Les modalités françaises seront connues de manière « ferme » après validation par la Commission.

2021 et 2022 seront donc deux années de transition pendant lesquelles le système d’aides actuel continuera à être appliqué, mais avec le nouveau cadre budgétaire. Un accord sur le règlement transitoire est attendu fin novembre/mi-décembre pour application au 1er janvier 2021.

2-Un budget maintenu sur les 7 années

Le budget de la Pac est à peu près reconduit en euros courants. La France est dotée de 7,3 milliards € pour le 1er pilier  et de1,5 milliards € pour le second pilier (aides cofinancées en moyenne à 50% par les Etats). Le plan de relance apporte, au niveau du second pilier, 290 millions € supplémentaires pendant deux ans. Le mouvement de convergence des aides directes par ha SAU entre les pays se poursuit vers la moyenne européenne (260 €/ha). La France perd ainsi 2% de ses aides directes au profit des pays les moins dotés.

Les Etats auront la possibilité de faire des transferts d’un pilier à l’autre, probablement jusqu’à 25%.

3-Un Plan stratégique national d’ici juin

Chaque Etat doit proposer à la Commission en 2021 un Plan stratégique national (PSN) pour les aides des deux piliers.  La nouvelle Pac introduit une obligation de résultat : un suivi de performances sera effectué avec des ajustements possibles. Qui va l’effectuer? La Commission pourra-t-elle enlever des crédits si les résultats ne sont pas atteints ? Les discussions promettent d’être serrées.

Chaque Etat doit par ailleurs définir ce qu’est un « véritable agriculteur » habilité à recevoir les aides.

4-Des aides du 1er pilier pour le climat-environnement

La nouvelle Pac introduit des éco-régimes (ou eco-sheme) qui sont financés à la place du paiement vert actuel. Ce sont des aides directes à l’hectare ou à l'animal pour des pratiques ou situations en faveur de l’environnement, du bien-être animal ou de la lutte contre le changement climatique. Le Conseil des ministres souhaite qu’au minimum 20% de l’enveloppe des aides du 1er pilier leur soient consacrés, le Parlement 30% en incluant les aides à l’investissement. Ces programmes climat-environnement sont proches des MAEC actuels mais avec une enveloppe budgétaire beaucoup plus importante. Exemple de programmes donnés par la Commission : l’agroforesterie, l’agroécologie y compris l’agriculture biologique, l’agriculture de précision, l’agriculture qui stocke du carbone.

5 -Aide de base, surprime et aides couplées

Le principe d’une Aide de base au revenu (correspondant aux DPB actuels) est maintenu ; la convergence interne entre DPB devrait se poursuivre. Le dispositif de surprime aux 1ers hectares est laissé au choix des Etats par les ministres ; le Parlement souhaite qu’il soit obligatoire. Les Etats gardent la possibilité d’avoir des aides couplées, dans la limite de 13% du 1er pilier pour les ministres, et de 10% pour le Parlement, auxquels s’ajoutent 2% pour les cultures protéiques (comme aujourd’hui).

Pac 1er pilier

6 -Davantage d’aides directes aux JA

Les Etats membres devront consacrer au minimum 2% de l’enveloppe des aides du premier pilier à l’aide forfaitaire Jeunes agriculteurs selon les ministres, 4% selon le Parlement. Actuellement, la France utilise 1% de son enveloppe pour les jeunes agriculteurs.

7-Les trois règles du paiement vert maintenues

Le paiement vert disparait mais la nouvelle conditionnalité des aides intégrera les trois règles du paiement vert actuel: 5% de SIE (Surfaces d’intérêt environnemental), diversité des cultures (avec des évolutions par rapport à la règle des trois cultures ), maintien des prairies permanentes.

8 -Plafonnement des aides de base au revenu

Les Etats qui le souhaitent pourront limiter à 100 000 € le total des aides de base au revenu perçu par une exploitation dans l’année, diminuée du coût de la main d’œuvre salariée. Le parlement veut que ce soit obligatoire. Cela ne concerne que très peu d'exploitations, en particulier en France.

9 -Pas de bouleversement pour le deuxième pilier 

Le contenu des mesures de développement rural diffère peu (DJA, MAEC, ICHN, assurance récolte, fonds de mutualisation etc ) mais le cadre laisse davantage de latitude aux Etats-membres : de 24 mesures précises, il n’en contient plus que 8.

La répartition des compétences entre l’Etat français et les Régions évolue : à partir de 2023, celles-ci conserveront le pilotage des aides à l’installation, d’investissement mais ne géreront plus les MAEC ni la bio.

10-Peu de changement pour la régulation des marchés

Les dispositifs d’OCM restent les mêmes: achats par l’intervention, droits de douane aux frontières, réserve budgétaire de crise. Les programmes fruits et produits laitiers aux écoles, financés à 50% par l’UE, sont reconduits. Le Parlement voudrait renforcer toutes ces mesures.

A noter qu’à la différence des quotas laitiers et des quotas betteraviers, la filière viticole a réussi à prolonger son mécanisme de limitation des plantations de vigne !

Des programmes opérationnels pour les OP

La nouvelle Pac donne aux Etats la possibilité de cofinancer des programmes opérationnels conduits par les Organisations de producteurs (OP) ou association d’OP) par prélèvement sur l’enveloppe des directes dans la limite de 3% de l’enveloppe. Ces programmes, inspirés du secteur fruits et légumes, peuvent financer 50% des dépenses portant sur la planification de la production, la concentration de l’offre, la recherche et le développement, la promotion des produits, l’amélioration de la qualité, la gestion des risques et la prévention des crises. Il ne s'agit pas d'une aide au revenu, ce sont des outils d'adaptation au marché. En fruits et légumes, un programme c'est 3 à 5 ans, avec une stratégie commerciale, un cahier des charges.

En savoir plus sur le site internet de la chambre d'agriculture de Normandie:La Pac après 2020: Ministres et Parlement prennent position