« Sélectionner des variétés de pommes adaptées à notre climat futur »

Joan Bonany, chercheur à l’IRTA (Espagne), décrit le programme d'hybridation mené en Espagne pour créer des variétés de pommes adaptées au futur climat.

« La plupart des variétés qui sont sélectionnées dans d’autres zones climatiques rencontrent dans la vallée de l’Ebre des problèmes de chute de fruits, de coups de soleil ou le développement de texture farineuse dus aux chaleurs estivales. Le challenge pour nous n’est pas la quantité de froid hivernal mais plutôt la résistance à des températures élevées prolongées. Afin de sélectionner des variétés adaptées à notre climat futur, nous avons conduit le programme d’hybridation dans une zone plus chaude que celles de production. Une sorte de machine à voyager dans le temps. Première variété issue de ce programme, HOT84 A1 est une variété bicolore, à la texture ferme et légère.

Le programme de plantation est déjà conséquent. Finalement, même sans nuits fraîches, nous avons réussi à obtenir des hybrides avec une bonne coloration rouge, de bonnes capacités agronomiques et gustatives. Mais dans ce travail, nous n’avons pas fait de phénotypages sur les caractères liés à la résistance à la chaleur. Et la question pour moi est de savoir si ce travail de phénotypage est vraiment utile à la société. Sur les caractères que nous avons travaillés : qualité agronomique ou de conservation, on a vu que l’amélioration était possible.

Mais plus on va dans des caractères qui touchent le cœur du métabolisme du pommier, comme l’efficience hydrique, plus le nombre de gènes impliqués est conséquent. La question se pose alors de l’intérêt des efforts fournis et de l’argent public dépensé pour essayer d’atteindre un objectif mobile, par exemple, un nombre d’heures de froid qui va évoluer dans le temps. Un programme à long terme avec des objectifs mobiles, le tout étant de combiner différentes tolérances : est-ce vraiment possible ? »