2018 : pratiquement toutes les régions viticoles voient leur récolte augmenter

Cette année, les vendanges françaises progressent de 25 % et sont prometteuses en qualité. Les vignerons pourraient être incités à reconstituer leurs stocks mis à mal en 2017. Les débouchés à l’export restent néanmoins fortement concurrentiels et liés aux variations des taxes, des monnaies et des politiques commerciales internationales.

Après une année 2017 très en dessous de la moyenne des années antérieures en volume, la prévision de récolte annoncée par le ministère de l'agriculture à 46,6 MHL en 2018 est un soulagement pour de nombreux viticulteurs. Elle progresse de 25 % pour retrouver un niveau proche de la moyenne des 5 dernières années.

Si le mildiou a occasionné des pertes, plus encore chez les producteurs biologiques, les pluies estivales ont évité les effets néfastes de la canicule. Les hausses ont été particulièrement importantes en Champagne et dans le Bordelais,

et pratiquement toutes les régions voient leur récolte augmenter. Au niveau mondial, après une année historiquement faible, la récolte devrait revenir à un niveau normal. L'Italie et l'Espagne renouent avec leurs volumes antérieurs et les baisses de production constatées dans l'hémisphère sud, en Afrique du Sud et Australie, sont compensées par des hausses en Argentine et Chili.

26 % du vignoble italien et 29 % du vignoble espagnol sont irrigués

Les fortes chaleurs enregistrées cet été et le réchauffement climatique annoncé posent la question de l'irrigation pour limiter le stress des vignes et au final améliorer la qualité. Celle-ci est interdite dans la plupart des appellations d'origine contrôlées alors qu'elle est possible pour les vins sans appellation. La législation est par ailleurs beaucoup plus souple dans les vignobles de nos concurrents étrangers. Aujourd'hui, 26 % du vignoble italien et 29 % du vignoble espagnol sont irrigués.

La « guerre commerciale » évolue et incite à la prudence

En France, la faible récolte 2017 a entraîné une baisse des stocks et favorisé l'écoulement des produits, tant sur le marché intérieur qu'à l'export. Les marchés export ne cessent de progresser en valeur. Cependant nos trois premiers marchés étant les États-Unis, le Royaume uni et la Chine, la croissance de nos ventes est liée à plus de 80 % à des pays hors Europe. Autant dire que le Brexit d'une part, et les taxes sur les produits exportés aux USA ou en Chine sont au cœur des préoccupations de la profession.

Les produits de luxe, tels que le Cognac ou les grands crus, sont très attractifs et peuvent supporter l'augmentation des taxes sur les différents marchés. Par contre, les vins à moindre prix sont beaucoup plus sensibles aux variations des taxes et des monnaies (dollars, livre, euros). Les vins inférieurs à 10 euros le litre pourraient voir leur volume d'exportation réduit. En cas de dépréciation de la livre Sterling, ils pourraient aisément être remplacés sur le marché britannique par des produits de substitution provenant du Nouveau Monde.

Aujourd'hui, nos exportations vers la Chine et les USA connaissent encore des périodes « record » compte tenu de nos atouts historiques. Mais les vins de l'UE sont désormais imposés en Chine à hauteur de 17 % alors que l'Australie et le Chili bénéficient d'accords commerciaux permettant l'import sans taxe. Cela pourrait compromettre le développement de nos ventes de vins à prix modérés destinés à la classe moyenne chinoise. Par contre, la Chine émet des taxes envers l'importation de vins américains ce qui pourrait favoriser notre positionnement face à ce concurrent.

Le vignoble bio continue son ascension

La surface a triplé en 10 ans et représente aujourd'hui 9 % de la totalité du vignoble. Ces surfaces sont réparties sur l'ensemble du territoire, mais l'Occitanie qui bénéficie de conditions climatiques favorables représente 30 % des surfaces.

La consommation de vin bio connaît une croissance de 20 % par an en moyenne depuis 2010.

À l'export, les ventes de vins bio se développent également, et aujourd'hui avec 46 % de la production exportée, ces derniers représentent les deux tiers des produits français bios vendus à l'étranger en valeur.

La proposition européenne de limiter la consommation de cuivre à 4 kg/ha et par an pourrait poser des problèmes et réduire la progression des conversions à l'agriculture biologique, voire même inciter certains producteurs à abandonner le bio: en 2018, année de forte pression de mildiou, 57 % des producteurs ont utilisé plus de 4 kg de cuivre par ha. (selon une étude des Vignerons Indépendants qui propose un lissage sur plusieurs années).

Article Cerfrance - veille économique - lettre n° 51/2018  Pierre-Gérard POUTEAU