Le Sénat émet de "vives inquiétudes" sur les premiers effets de la loi Alimentation

La commission des affaires économiques du Sénat a émis de "vives inquiétudes" sur les premiers effets pervers de la loi Alimentation, après avoir auditionné le 5 juin l'ensemble des parties prenantes de la chaîne alimentaire.

"Les premiers retours du terrain démontrent que la hausse des prix sur les produits de grandes marques payée par le consommateur ne bénéficie pas pour l'instant à l'amont. Le ruissellement, ce n'est pas pour maintenant", a assuré Anne-Catherine Loisier, co-rapporteure de la loi issue des états généraux de l'alimentation (Egalim). L'ensemble des parties prenantes de la chaîne alimentaire, des producteurs aux distributeurs, ont été réunis le 5 juin par la commission des affaires économiques du Sénat afin de débattre des premiers effets de cette loi Egalim, adoptée en octobre dernier.

"Il faut absolument rouvrir le dossier de l'encadrement des promotions en grande surface car certaines PME pourraient ne pas passer le cap des deux années d'expérimentation prévues dans la loi", a indiqué le rapporteur Michel Raison. "Déjà défavorisées par le seuil de revente à perte (SRP) qui rentabilise les produits des grandes marques, les PME doivent également limiter leurs promotions à 25% de leur chiffre d'affaires en magasin, alors que les promotions sont un des seuls moyens pour elles de s'imposer face aux grandes marques internationales", selon un communiqué du Sénat. L'évolution des pratiques commerciales "pose également problème, notamment en déplaçant la guerre des prix des grandes marques vers les produits sous marque de distributeur (MDD) ou en l'entretenant par des remises sur cartes de fidélité".

Divergences entre distributeurs et fournisseurs

Les sénateurs ont pris acte des "profondes divergences d'analyse sur les résultats des négociations commerciales", les distributeurs saluant "un état d'esprit beaucoup plus positif" (Jacques Creyssel, Fédération du commerce et de la distribution) alors que les fournisseurs dénonçaient "la poursuite de la guerre des prix" (Catherine Chapalain, Association nationale des industries agroalimentaires).

Selon Sophie Primas, présidente de la commission des Affaires économiques, "des points d'étape seront organisés régulièrement avec les professionnels concernés pour relever les points positifs mais aussi les difficultés rencontrées par les acteurs afin de proposer, au plus vite, les correctifs nécessaires. Et compte tenu des premiers retours, ces correctifs apparaissent indispensables".

La loi Egalim est censée permettre de sortir d'un effet domino intenable : la guerre des prix entre les quatre grands de la distribution en France les pousse à réclamer des tarifs toujours plus bas auprès de leurs fournisseurs de l'industrie agroalimentaire, qui eux-mêmes achètent à leur tour le moins cher possible la matière première agricole auprès des agriculteurs, en bout de chaîne.