Ours tué dans les Pyrénées : les éleveurs dénoncent une "prime à la délation"

Depuis la découverte d’un ours tué par balle le 9 juin dernier en Ariège, les tensions montent de plus en plus dans le département entre les « pro » et les « anti » ours. La Fédération nationale ovine (FNO) dénonce les « pratiques indécentes » des associations environnementalistes.

Le jeune ours mâle de 150/200 kg a été retrouvé mort le 9 juin près de la station de ski de Guzet (Ariège). C'est le deuxième ours de l'année à être retrouvé mort. Le premier, Cachou, accusé de nombreuses prédations, avait succombé côté espagnol à 50 km de là en avril, sans que les causes du décès n'aient été divulguées.

Une enquête a été ouverte pour « destruction non autorisée d'une espèce protégée », une infraction passible de trois ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende. La ministre de la Transition écologique, Élisabeth Borne, a dénoncé un acte « illégal et profondément condamnable », et précisant que l'État allait porter plainte.

Suite à ce second décès, les pro-ours ont exhalé leur colère en dénonçant le « braconnage par balles d'un ours ». « Ce nouveau pas franchi dans la violence s'inscrit dans un contexte d'impunité des opposants à l'ours radicaux et violents que nos associations dénoncent depuis des années », disent Pays de l'ours, Férus et d'autres associations dans un communiqué conjoint. Elles appellent l'Etat à respecter son engagement de « remplacer rapidement tout ours mort de cause humaine ». Le dernier lâcher d'ours slovènes remonte à 2018, le gouvernement ayant depuis gelé les réintroductions face aux oppositions.

Contraint par la législation européenne sur la protection de la biodiversité, l'Etat français a lancé dans les années 1990 un programme de réintroduction de l'ours brun dans le massif pyrénéen, où l'espèce avait pratiquement disparu. Les autorités dénombrent désormais 50 spécimens dans les Pyrénées, niveau qui n'assure toutefois pas la survie de l'espèce. Le président de la chambre d'agriculture d'Ariège, Philippe Lacube, les estime pour sa part entre « 60 et 80 ».

L'Association pour la sauvegarde du patrimoine d'Ariège-Pyrénées (ASPAP) est montée au créneau le 10 juin dans un communiqué : « nos pensées vont vers tous les éleveurs qui subiront la pression et les attaques des 50 ours restant, bien vivants eux, contre lesquels l'Etat ne les protège pas ». « De l'autre côté du fusil, il y a d'abord les associations pro-ours incendiaires qui ont semé la guerre et la discorde dans les Pyrénées », poursuit l'ASPAP.

Dans un communiqué publié le 12 juin, la Fédération nationale ovine (FNO) rappelle que « les éleveurs sont les premières victimes des attaques de ce prédateur et sont soumis à une détresse profonde face à l'incurie des ministères dans la gestion de ce dossier ». La FNO donne pour exemple les « dégâts irréparables sur leurs troupeaux », les « tests d'effarouchement infructueux », les « mesures de protection inefficaces » ou encore les « contraintes complémentaires à venir avec notamment l'obligation préalable de mettre en place des moyens de protection pour être indemnisés dès l'année prochaine... ».

« A cela, s'ajoutent les pratiques indécentes que subissent les éleveurs de la part des associations environnementalistes locales : accusations implicites sans preuve de braconnage, patrouilles en montagne pour dénoncer tout comportement suspect des bergers et des éleveurs face à un ours... » dénonce Franck Watts, Administrateur FNO en charge de ce dossier dans le département, cité dans le communiqué.

La FNO dénonce la « prime à la délation » de l'association Sea Shepherd France, qui a annoncé le 11 juin offrir une récompense de 10 000 euros pour identifier le responsable de la mort de l'ours. Une pratique « indigne », clame la FNO, « alors que les éleveurs essaient eux de vivre dignement de leur métier ».

Ces évènements surviennent juste après l'annonce du gouvernement, le 4 juin, d'une rallonge de 500 000 euros aux fonds alloués à la cohabitation entre pastoralisme et ours. Pour la seule Ariège, 565 dossiers d'indemnisation ont été introduits l'an dernier, comptabilisant 1 155 ovins morts ou blessés.