Bilan de la campagne 2024/2025 d'orges d’hiver

Quel impact ont eu l'automne pluvieux, la sécheresse printanière et la chaleur sur les composantes de rendement, la qualité et la précocité des orges d'hiver en 2024/25 en Champagne-Ardenne ?

Début d’automne pluvieux puis retour à la norme

Les pluviométries élevées rencontrées sur la campagne 23/24 se sont poursuivies jusqu’à la mi-octobre 2024, perturbant les semis dans une moindre mesure que l’année précédente. Finalement, les surfaces emblavées en orge d’hiver sur notre territoire ont été maintenues à hauteur de 134 000 ha, d’après Agreste. 

À l’automne, quelques pucerons ont pu être observés. Quelques parcelles présentant des symptômes de jaunisse nanisante de l’orge (JNO) ont été signalées sur les variétés sensibles comme KWS Faro en sortie hiver, heureusement sans incidence notable sur le rendement. En revanche, les symptômes de phytotoxicité désherbage ont été plus fréquemment cités, engendrant des pertes de plantes dans les situations les plus graves.

Les températures et pluviométries hivernales s’inscrivent dans la moyenne des dix dernières années. Les biomasses en sortie d’hiver étaient dans les normes. Les mois de février et mars, légèrement plus chauds que la médiane, ont favorisé l’émissions de talles. Ainsi, le nombre de talles à plus de 3 feuilles compté au stade épi 1 cm était environ 20 % supérieur à la moyenne des 10 dernières années en craie (figure 1).

La date d’occurrence du stade épi 1 cm, autour du 25 mars, était dans la norme. Figure 1 : voir le graphique ici  - Source : Observatoire ARVALIS

La sécheresse à montaison limite le potentiel installé

Dès mi-mars, voire début mars selon les secteurs, les pluies se sont faites très rares (figure 2). Ces conditions sèches ont retardé la valorisation des apports d’azote à cette période. Ainsi, une compétition pour l’eau et pour l’azote entre les talles a conduit à la régression de certaines d’entre elles. Les comptages de densités d’épis à épiaison ont en effet montré des régression de talles, avec une densité d’épis inférieure de 10 % par rapport à la moyenne des 10 dernières années en craie (figure 3).

Figure 2 : voir le graphique ici  : Cumul de pluie (en mm) par décade sur le cycle de l’orge d’hiver en 24/25 pour la station de Fagnières (51)

Figure 3 :  voir le graphique ici   - Nombre d’épis au m² en fonction du nombre de talles à plus de 3 feuilles, pour l’orge d’hiver sur la campagne 24/25 : Source : Observatoire ARVALIS

À la fin du mois d’avril, les températures cumulées étaient supérieures à la médiane sur 20 ans de cette période. Cette chaleur a fait avancer les stades rapidement. Le stade épiaison est survenu autour du 28 avril : une précocité qui a surpris. La durée de montaison moyenne au cours du printemps 2025 n’a compté que 36 jours, soit quasiment 10 jours de moins que les années précédentes. Ce raccourcissement de la durée de la montaison n’a pas été favorable à la montée à épis. Avec de fort rayonnements, supérieurs aux 20 dernières années pendant plusieurs semaines consécutives, la fertilité épi était bonne. Néanmoins, cela n’a compensé qu’en partie le manque d’épis au m². Ainsi, le nombre de grains au m² était environ 4 % en dessous de la moyenne des 10 dernières années en craie (figure 4).

Figure 4 :  voir le graphique ici  - Nombre de grains au m² en fonction de la densité d’épis pour l’orge d’hiver sur la campagne 24/25 : Source : Observatoire ARVALIS

La précocité permet d’esquiver le stress thermique et favorise un bon remplissage

Le remplissage des grains a débuté sous des conditions idéales de rayonnement et températures : la taille des enveloppes n’a donc pas été une contrainte. Ce climat a également été associé à une pression en maladies foliaires faible. Cependant, la rouille naine a pu être présente localement en début et en cours de cycle, en particulier sur KWS Faro, qui est très sensible. La ramulariose a pu également être observée en fin de cycle, mais de manière non généralisée et avec une incidence faible sur le rendement (les programmes fongicides appliqués associant des matières actives globalement efficaces vis-à-vis de la ramulariose sur ces niveaux de pression). Le stress hydrique a impacté la densité épis mais très peu la cinétique de remplissage. Le remplissage s’est poursuivi sous des températures correctes. L’avance de développement des orges d’hiver leur a permis d’éviter le coup de chaud du mois de juin, le stade grain pâteux étant largement atteint à ce moment-là. Finalement, les poids de mille grains (PMG) étaient plus de 10 % au-dessus de la moyenne en craie, compensant donc le manque de grains au m². Les rendements sont donc meilleurs que ce qui pouvait être pressenti en cours de campagne et légèrement supérieurs à ceux des 10 dernières années. A noter des moissons dès la 2e quinzaine de juin.

Côté protéines, l’absence de pluie durant une longue période au printemps n’a pas favorisé l’absorption d’azote : la quantité d’azote absorbée par les cultures n’a quasiment pas évolué entre les stades dernière feuille et floraison. La biomasse, quant à elle, a continué à croître. Les Indices de Nutrition Azotée (INN) étaient donc globalement bas à floraison, et associés à des teneurs en protéines sur la fourchette basse (autour de 10 %), tout en restant dans les standards requis pour le débouché brassicole.

Du côté de la qualité, les poids spécifiques (PS) et calibrages sont bons voire très bons : cela corrobore bien la cinétique de remplissage quasi idéale des orges d’hiver sur notre territoire, conjuguée à une pression maladies faible.

Figure 5 : voir le graphique ici  - Trajectoire de mise en place du PMG au cours de la période de remplissage du grain pour l’orge d’hiver sur la campagne 24/25 - Source : Observatoire ARVALIS

Et les orges de printemps semées à l’automne (OPSA) en 2025 ?
Les orges de printemps semées l’automne présentent notamment un intérêt les années sèches. En allongeant le cycle et la phase de tallage, la composante épis/m² est meilleure qu’en cycle court au printemps. En 2025, lorsque les Opsa n’ont pas subi de pertes de plantes par le gel hivernal associé aux herbicides, les rendements ont été au rendez-vous, dans des niveaux semblables aux orges d’hiver. À noter que le printemps sec a rendu simple la gestion des maladies, qui est le point noir à contrôler en année humide…